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Henri Irénée Marrou    L'historien doit être ouvert à tout l'humain


     La valeur de la connaissance historique est directement fonction de la richesse intérieure, de l'ouverture d'esprit, de la qualité d'âme de l'historien qui l'a élaborée. Nous avons trop tendance à l'oublier, nous, hommes du métier, si fiers de notre compétence technique, déformés que nous sommes par des années de spécialisation, par l'effort parfois surhumain qu'il nous a fallu dépenser pour l'acquérir. Notre public par contre y est très sensible (je parle de notre vrai public, la société pour laquelle nous travaillons) : l'accueil découragé que reçoivent nos productions («histoire académique, science officielle, pure érudition»), cette indifférence, ce mépris que nous ressentons comme une injustice, proviennent du contraste que révèlent trop de nos travaux entre une exigence technique poussée jusqu'au scrupule et une philosophie générale sur l'homme, la vie et ses problèmes, digne d'un journaliste de troisième ordre, une méconnaissance puérile des grands problèmes posés à la conscience de notre temps, et qu'une attention suffisamment éveillée aurait dû pouvoir reconnaître dans la vie de ces hommes du passé que nous prétendons redécouvrir. L'historien doit être aussi et d'abord un homme pleinement homme, ouvert à tout l'humain et non pas s'atrophier en rat de bibliothèque et boîte à fiches!

De la connaissance historique, p.98.


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