Aujourd'hui,
dans tous les domaines, l'homme est à la recherche de rapidité,
d'efficacité. Si elle gère notre quotidien au plan matériel, parfois avec de
bons résultats, cette dynamique de progrès peut-elle s'appliquer au plan
spirituel ? Celui-ci n'est-il pas considéré comme une voie lente, laborieuse
et difficilement accessible, se déroulant sur des années et pour certains,
sur des vies ! Est-il possible de survoler "l'océan de l'ignorance" en avion
plutôt que de tenter de le traverser à la nage ?
Certains grandes maîtres l'ont cru et
ont enseigné "la voie de l'oiseau" pour la distinguer de "la voie de la
fourmi", réservée aux méthodes basées sur la méditation, sur la lente
transformation des pulsions désordonnées, l'apaisement des agitations
mentales, des désirs et des passions.
Contrairement aux autres approches, la
"voie de l'oiseau" n'essaie pas de transformer quoi que soit ! Elle
s'interroge plutôt sur la nature de ce que l'on cherche à transformer :
quelle est sa consistance, sa solidité, sa réalité ?
En cernant attentivement la nature d'un
serpent endormi, on pourrait être soulagé en constatant qu'il ne s'agissait
que d'une simple corde négligemment déposée dans un endroit obscur! Dès
lors, à quoi bon chercher à apprivoiser ou à neutraliser le reptile, à
s'interroger sur son pedigree, son espèce, sa toxicité ? Ne vaut-il pas
mieux découvrir le pot aux roses ? Cette révélation de "ce qui est" nous
mène droit au but en nous plongeant d'emblée au cœur de la Vérité ultime.
« Jugée parfois difficile, [cette
approche] est cependant un merveilleux raccourci vers le but. [...] elle est
d'une étonnante simplicité [...]. Ne requérant a priori ni foi, ni credo
particulier, ni engagement dans aucune institution ou groupe spirituel, elle
s'adresse indistinctement à tous, croyants ou non-croyants, et tout
spécialement à ceux qui souhaitent cheminer sur leur propre voie, sans
dépendance vis-à-vis de quoi que ce soit ou de quiconque. Elle ne nécessite
même pas la guidance autorisée d'un Maître extérieur et s'en remet à la
compétence du Maître intérieur, le seul vrai Maître.
Par ailleurs, elle ne demande pas de
quitter le monde, d'entrer dans le silence, ni même de devenir adepte de la
méditation pendant de longues années. Cette dernière pratique est d'ailleurs
appelée parfois "voie de la fourmi", tandis que la voie de la compréhension
se nomme "voie de l'oiseau" : elle est donc un précieux raccourci vers le
but. Loin de nécessiter un retrait du monde, irréaliste pour beaucoup, elle
se pratique au cœur de la vie active et même, paradoxalement, c'est là
qu'elle excelle et produit les meilleurs résultats !
Contrairement aux autres chemins
spirituels qui nécessitent silence, recueillement et concentration -
conditions si difficiles à réaliser aujourd'hui - elle s'accommode fort bien
de l'agitation, du bruit et même des turbulences du monde moderne. Ne
nécessitant pas de se protéger du stress, ni de se mettre à l'écart - ce qui
n'est pas non plus sans intérêt - elle se pratique au sein même de l'action
et de la "pâte humaine", en plein vent et même dans la violence des
cyclones.
Le lecteur se sentira sans doute
intrigué par une proposition qui semble si contraire aux enseignements
classiques basés sur l'ascèse, le renoncement, la quête du silence. Qu'il se
tranquillise en sachant que cette voie n'est pas une création nouvelle, mais
un chemin traditionnel, mal connu certes, souvent éclipsé par d'autres
approches plus ésotériques ou confiné à une élite intellectuelle. Mais, que
l'on se rassure, il est véritablement à la portée de tous.
Il ne nécessite aucune qualité
intellectuelle spéciale, sinon une attention et une vigilance qui
s'acquièrent avec la pratique. »