Commentaires philosophiques

 

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Marx l’aliénation de l’ouvrier Manuscrit de 1844 
texte dans le livre, p.26 T.2

1) l’exploitation du travail sur le plan économique. Au bénéfice de qui se fait la production ? Non pas de l’ouvrier, mais du capital qui détient les moyens de production et qui tire profit du marché. L’ouvrier dit Marx " s’appauvrit " alors même que la production de " richesse " ne fait qu’augmenter. L’échange dans lequel s’introduit la production ne revient pas à celui qui l’a produit. Pire, au fond, l’ouvrier est assimilé à une "marchandise " : on dit qu’il y a un coût du travail. C’est une aberration au sens où, s’il existe bel et bien des marchandises échangées, c’est grâce à des hommes qui les fabriquent. Le travail est à l’origine de la valeur des choses. Le travail donc est au-dessus de cette valeur, il lui est supérieur. Or, dans le système économique qui est le nôtre, nous dévalons le travail sur le plan des marchandises, l’ouvrier est considéré sur le même plan que la marchandise. D’où un déplacement pervers de la notion de valeur. Elle est pensée sur un plan économique au lieu d’être saisie sur un plan humain. " Plus le monde des choses augmente en valeur plus le monde des hommes se dévalorise ". Or, c’est le travail qui fait le travailleur, le travail ne fait pas que "produire des marchandises ". C’est le propre de la pratique humaine que de transformer la nature, de créer des objets et en créant, l’homme se créé lui-même, il se construit dans son travail et pas ailleurs. En effectuant une coupure entre la valeur humaine et la valeur économique du travail, on en vient à une seconde perversion :

2) l’aliénation qui rend l’ouvrier étranger à ce qu’il produit. L’aliénation veut dire processus par lequel je deviens "autre ", on n’est plus soi-même, l’ouvrier est dépossédé de lui-même car dans le fruit de son travail il ne peut plus se reconnaître. Si l’on compare sur le ce plan un ouvrier et un artisan, la distinction est claire. L’artisan élabore ce qui peut s’appeler une œuvre, il a part à sa conception, il a part à son élaboration, au choix des moyens. Il peut avoir la fierté de contempler un bel ouvrage. L’artisan maçon qui réalise une maison peut avoir une fierté de contempler le produit de son travail quand il a fini. Il a donc le sentiment de la totalité et la possibilité de se reconnaître et d’être reconnu dans son travail. L’ouvrier sur une chaîne de production n’a pas cette possibilité. Ce n’est pas lui qui a conçu l’objet mais le bureau d’étude, il n’en voit qu’un aspect limité, il n’a part à son élaboration que dans une petite tranche de sa réalisation, une tâche spécifique. Il est privé de la satisfaction d’élaborer une œuvre. De plus ; il ne se reconnaît pas lui-même dans ce qui sort de ses mains, et il n’est pas reconnu dans ce qu’il a fait. Le travail parcellaire, le travail à la chaîne est très anonyme, impersonnel. L’ouvrier qui est là à un point de la chaîne peut-être remplacé du jour au lendemain par une autre. Le résultat, c’est donc celui d’une aliénation de l’ouvrier dans son travail. Il est placé dans une situation où il devient étranger à son travail, étranger à sa propre vie dans le cadre du travail, car ne lui est pas donné la possibilité d’être lui-même, de s’accomplir dans son travail. Le travail industriel est en fait de nature mécanique, il n’est plus un travail mais seulement une tâche que bientôt une machine fera tout aussi bien. Dès le début de l’ère industrielle, de la production de masse, le travail s’est aliéné. Il est démantelé en tant que totalité. Il y a le " produit du travail " d’un côté, et le " travail " de l’autre. Dans les conditions "de l’économie politique " du capitalisme, l’ouvrier est spolié du fuit de son travail, il y a dans le travail une "déperdition ", un "dépouillement ". Il a perdu son travail dans son sens plein : une œuvre, il a été placé vis à vis du producteur dans une situation de "servitude ". La "matérialisation du travail " qu’il a accomplit lui échappe irrémédiablement. Les "objets " qui sortent de ses mains lui sont devenues "étrangers ".

3) Quel est donc le "fait " fondamental dont ce qui précède serait les "conséquences " ? L’ouvrier est placé dans une situation telle que son travail ne plus paraît plus que comme un "objet étranger ". Du matin au soir il vend sa force de travail, il produit. Il nourrit un système de production gigantesque mais vis à vis duquel il est comme étranger. Le monde extérieur des choses devient "puissant " au sens où l’empire que gagne la consommation ne fait que s’accroître. Mais face à cela, que devient  "le monde intérieur " de l’ouvrier ? S’est il enrichit lui-même en travaillant ? Il a plutôt le sentiment qu’on lui vole tous les jours ce qu’il produit, sa richesse lui est prise. Plus le monde des objets et de la consommation devient opulent, plus le sentiment de misère intérieure et de dépossession devient cruel. Le trésor de la valeur du travail a été volé pour être seulement investit dans la valeur des choses. Nous ne voyons que le prix dans la vitrine. Nous oublions tout le travail que cela a pu coûter, nous oublions que c’est cela la dimension vraie de l’objet. Reste seulement la mesure économique. La valeur a été déplacée de l’intérieur (le monde intérieur de l’ouvrier) vers l’extérieur, le monde des choses du marché. Marx fait alors une comparaison avec la religion. CE que les hommes ne trouvent plus en eux-mêmes, ils le projettent en Dieu. On transfère sur Dieu des valeurs humaines en le voyant comme une somme infinie de qualités humaines. " Plus l’homme place en Dieu, moins il conserve en lui-même ". Marx raisonne à partir de la conception anthropomorphique de la religion, Dieu étant une sorte d’homme magnifié. De même, "l’ouvrier met sa vie dans l’objet ", il investit ce qu’il est dans la chose, "et voilà qu’elle ne lui appartient plus ", on lui dérobe le sens même de son investissement, ce qui reste, c’est seulement tel "objet " dans la vitrine, sur les étalages du supermarché. L’ouvrier n’est plus le produit de son travail, il n’est plus lui-même à travers son travail.

4) La coupure donc entre l’ouvrier et ce qu’il produit est plus dramatique que nous pouvions l’imaginer. Il y a dans le processus de la technique industrielle une objectivation du travail qui lui enlève son caractère essentiel, sa subjectivité. Cette subjectivité intérieure, Marx la dénomme la vie. Le procès de l’industrialisation a consisté à vider le sens du travail en lui ôtant sa valeur humaine d’épreuve de soi, d’accomplissement de soi, ce rassemblement de la vie dans une œuvre qui est le seul sens du travail. Le travail est travail vivant où il n’est pas. Quand il se trouve que l’ouvrier connaît que "la vie qu’il a prêtée à l’objet s’oppose à lui ", il se sent intérieurement dans son travail comme étranger au monde qu’il produit. Il se trouve face au monde des objets technique comme devant "une puissance autonome " face à lui. Il se sent exclus dans un monde qu’il a pourtant contribué à créer.

Une telle situation s’oppose à la symbiose que constituait au moyen Age, les corporations d’artisans dans la société traditionnelle. Il faut noter à quel point en ce sens le mot même " d’ouvier " (celui qui fait une œuvre) devient menteur dans l’ère industrielle et aussi quel empire va prendre la valeur économique sur la valeur humaine.


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