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Sagesse des contesLes trois portes, combattre et accepter (suite)
Arrivé de l'autre côté, le Prince aperçut la face arrière de la première porte Commentaire:Cette histoire est un résumé saisissant de l'aventure spirituelle de la conscience dans le monde. au commencement est la dualité sise dans la vigilance. La dualité engendre d'elle-même l'opposition. Le moi se pose face à un non-moi et se construit en tant que telle comme un ego différencié, il s'incarne dans l'individu. Mais la conscience individuelle, parvenue à l'age adulte prend conscience de sa limitation, souffre d'un manque d'être, d'un vide. Elle n'est pas achevée, et il faut une éducation par l'Éveil pour qu'elle se trouve elle-même et trouve son achèvement. Par quel étape commence l'initiation? Par la détermination de la volonté à affronter le monde. La jeunesse est spontanément idéaliste, elle veut changer le monde. Pour cela il lui faut lutter avec le monde, faire un effort pour transformer ce qui est et le changer en autre chose. La conscience de l'ego y trouve le triomphe de sa volonté de puissance. Mais elle rencontre aussi sa limite. Il y a ce qui dépend de moi et que je puis changer et ce qui ne dépend pas de moi et que je ne peux pas changer. Après avoir voulu tout changer, je dois apprendre aussi à prendre les choses comme elles sont dans ce que je ne puis transformer. Le volontarisme qui mûrit devient un stoïcisme. Une fois que celle leçon est assimilée, la seconde épreuve, toujours dans la dualité, va consister à vouloir changer les autres. On reconnaît là encore la mainmise de l'ego, son désir d'intervenir dans la pensée d'autrui, de modifier, de corriger. C'est le redresseur de tort et le donneur de leçon de morale, l'idéaliste encore, mais qui cherche à manipuler pour améliorer. L'ego se donne là carrière, car il trouve aussi là une jouissance de sa volonté de puissance - sous un couvert très moral. Là aussi l'ego rencontre une limites : l'autre est ce qu'il est, et il n'est jamais exactement la cause de mes malheur, mais seulement l'occasion pour que me soit renvoyé mes propres refus. Pour la seconde fois, le sage va prolonger le constat du prince et l'inviter à tourner son regard vers l'intérieur, l'inviter à voir dans la relation une expérience qui me remet constamment face à moi-même, une expérience par laquelle la Vie m'enseigne ce qui est caché dans les angles mort de la personne, ce que je ne vois pas. Le troisième combat sera le combat contre soi-même. L'ego a encore d'une motivation dans le devenir. Il a appris que l'on ne peux pas changer le monde, ni changer les autres. Il est invité au grand travail consistant à vouloir se changer soi. C'est la démarche d'une introspection moralisante, telle qu'on la rencontre par exemple dans le journal intime d'Amiel. C'est une lutte sévère qui entretient le jugement sur soi, la haine de soi. Le prince en ressort encore une fois déçu : on ne peut pas tout changer en soi-même. Il y a cette nature de chacun qui le constitue et que l'on en parvient pas à modifier. Le prince comprend donc qu'il n'y a pas à rejeter quoi que ce soit en soi-même, à entretenir une division entre soi et soi, mais à s'aimer sans condition; ce même amour sans condition qu'il avait trouvé dans l'amour du monde et l'amour des autres, après la lutte du changement. Que reste-t-il alors? a faire le chemin en sens inverse. A trouver ce que l'aveuglement de l'ego en devenir l'avait empêché de voir. Il reste à accepter ce qui est c'est le retour pour lire ce qui était au dos du fronton : accepte toi toi-même, accepte les autres, accepte le monde. Dis OUI à ce qui est et en disant ce OUI suprême tu trouveras l'apaisement. Le prince comprend alors à quel point il avait en fait été dur, cruel, dans son souci de changer le monde, les autres et soi-même. Il est parvenu au point où il peut jeter un nouveau regard sur les mêmes objets. En ce sens l'Éveil ne change rien, c'est un regard complètement différent sur la réalité, mais ce regard a aussi son propre pouvoir. Le prince revient vers le Soi et y rencontre le Silence. Tout est à sa place. Toutes choses sont ce qu'elles sont, parfaites dans leur imperfection même, parfaite dans leur limites, dans le temps, le lieu et les circonstances qui sont les leurs. Ce qu'il fallait changer, ce n'était pas le champ des objets, mais seulement le regard sur le monde. Passer du regard dur de la vigilance au regard intense, tendre et aimant de la lucidité. Passer de la vigilance à la Présence. C'est cela qui mère à la conscience d'unité. Et la conscience d'unité est le but de la Vie. .
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