Q. Le sourd est obligé d'associer le son à la couleur. cf Emmanuelle Laborit Le cri de la mouette.
R. L'imagination vient compenser cette énigme du son par un festival de couleur (la trompette, ce doit être comme un orange éclatant).
Q. Elle se trouve dans un monde clos ou bien vit-elle sur deux monde parallèles?
R. Le texte dit clairement qu'elle ressent l'absence de communication comme le fait d'être enfermée dans un monde clos qui n'est ouvert que par la relation à sa mère. Par contre elle distingue très bien deux formes du silence : silence de l'absence de communication et silence intérieur. Elle dit qu'elle a ses bruit à elle, incompréhensibles pour un entendant.
Q. Cette façon de ranger ses poupées, en se comparant elle-même à une poupée que l'on range, cela veut dire qu'elle a besoin de mettre de l'ordre dans son désordre intérieur? Peut-on dire que la petite fille range ses poupée à cause de son désordre mental?
R. Nous n'allons pas dire que le besoin de ranger est pathologique. Non, il est tout naturel. Par contre, il existe des troubles obsessionnels où le sujet éprouve le besoin de ranger sans cesse pour maîtriser la réalité, certainement en raison d'un état de confusion intérieur. Ce qui est dé-rangé perturbe le rangement que le moi veut effectuer pour tenter de contrôler.
Q. C'est curieux cette identification "administrative", le nom reçu de l'extérieur qui la surprend. comme si on ne trouve pas son identité, mais qu'elle est d'abord donnée socialement avec le nom propre.
R. Dans identité, il y a identification et pour identifier, il faut donner un nom. Sans langage, en apparence, pas d'identité distincte. D'où cette surprise quand elle comprend que toute le monde a un nom et qu'elle s'appelle "Emmanuelle".
Q. Elle n'avait pas conscience du moi, car son "je" était encore enfouit au fond 'elle-même et c'est le je qui connaît et fait ressortir le moi.
R. Très juste.
Q. Il y a des sourds qui refusent l'intervention chirurgicale qui les sortiraient de leur monde.
R. Dans une famille de sourds-muets l'enfant risquerait de se sentir coupé de ses parents et d'un autre côté de ne pas intégrer vraiment le monde des entendants. Cela explique la réaction des sourds-muets devant cette idée. Ils préfèrent développer leur propre mode de communication par signes plutôt que d'entrer dans un monde auditif qui leur est interdit. C'est vrai que forcer un sourd-muet à simuler la parole lui demande des heures et des heures de travail pénible pour un résultat médiocre, puisqu'il n'entend pas ce qu'il dit, pour le seul bénéfice de quelques personnes qui l'écoutent.
Q. Je n'ai toujours pas compris comment les sourds-muets font pour se parler à eux-mêmes. Je sais qu'ils pensent par images comme nous, mais comment est-il possible qu'ils aient une réflexion sur soi-même.
R. La route qui conduit à la réponse à une telle question est barrée par la linguistique ! Nous avons une telle appréhension verbale du signe que nous ne pouvons pas comprendre comment il peut y avoir une pensée qui n'est pas associée à une verbalisation sous la forme de mots. Il est incompréhensible de saisir ce que peut-être la vie intérieure, dans son bavardage incessant chez une personne qui n'entend pas, parce qu'évidemment le terme de "bavardage" n'a plus de sens. Et pourtant, il y a bien le flux vivant d'une pensée et d'une intelligence, une intuition qui jaillit, qui court d'une idée à une autre, qui doit sûrement s'appuyer sur des symboles, mais des symboles visuels et non pas auditifs, la vision écrite du mot doit être bien associée à son idée. Ce ne sont pas des petits singes tout de même. Ce sont des êtres humains. C'est là que l'on repère les limites de la linguistique qui se réfère à l'étude comparative des langues. Le Soi est déjà centrée sur soi dans le sentiment. Quand il se réfléchit lui-même dans la pensée, il se sert du support des signes.
Avec la participation d'Emilie Molders, de Blanche Konrad, Hélène Joie, Aurélie Larché, Nolwen Le Serrec. Alice Marvier.
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