Textes philosophiquesBergson la perception et l'état de veilleA l'état de veille, la connaissance que nous prenons d'un objet implique une opération analogue à celle qui s'accomplit en rêve. Nous n'apercevons de la chose que son ébauche ; celle-ci lance un appel au souvenir de la chose complète ; et le souvenir complet, dont notre esprit n'avait pas conscience, qui nous restait en tout cas intérieur comme une simple pensée, profite de l'occasion pour s'élancer dehors. C'est cette espèce d'hallucination, insérée dans un cadre réel, que nous nous donnons quand nous voyons la chose. Il y aurait d'ailleurs beaucoup à dire sur l'attitude et la conduite du souvenir au cours de l'opération. Il ne faut pas croire que les souvenirs logés au fond de la mémoire y restent inertes et indifférents. Ils sont dans l'attente, ils sont presque attentifs. Quand, l'esprit plus ou moins préoccupé, nous déplions notre journal, ne nous arrive-t-il pas de tomber tout de suite sur un mot qui répond justement à notre préoccupation ? Mais la phrase n'a pas de sens, et nous nous apercevons bien vite que le mot lu par nous n'était pas le mot imprimé : il y avait simplement entre eux certains traits communs, une vague ressemblance de configuration. L'idée qui nous absorbait avait donc dû donner l'éveil, dans l'inconscient, à toutes les images de la même famille, à tous les souvenirs de mots correspondants, et leur faire espérer, en quelque sorte, un retour à la conscience. Celui-là est effectivement redevenu conscient que la perception actuelle d'une certaine forme de mot commençait à actualiser. L'Energie spirituelle , P.U.F. Indications de lecture :Voir leçon sur la perception.
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