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Textes philosophiquesS. Aurobindo Raison et religion : la connaissance spirituelle" Le coeur profond, l'essence intime de la religion, indépendamment de la machinerie extérieure des credo, des cultes, des cérémonies et des symboles, est la quête et la découverte de Dieu. Son aspiration est découvrir l'Infini, l'Absolu, l'Un, le Divin qui est toutes ces choses, et n'est cependant pas une abstraction mais un être. Sa tâche est de vivre sincèrement et totalement les relations vraies et intimes de l'homme avec Dieu : relation d'unité, relation de différence, relation de connaissance illuminée, d'amour et de félicité extatique, de soumission et de services absolu- d'arracher à leur état ordinaire toutes les parties de notre existence et de faire jaillir l'homme jusqu'au Divin et descendre le Divin dans l'homme. Tout cela n'a rien à voir avec le domaine de la raison ni avec ses activités normales, le but de la religion, sa sphère et ses processus sont suprarationnels. La connaissance de Dieu ne s'obtient pas en pesant les faibles arguments de la raison pour ou contre l'existence de Dieu; elle tient seulement de soi et la consécration absolue, par l'aspiration et l'expérience. Et cette expérience ne procède aucunement comme le fait l'expérimentation scientifique rationnelle, la pensée philosophique rationnelle. Même les parties de la discipline religieuse qui semblent le plus ressembler à l'expérimentation scientifique, font appel à des méthodes de vérification qui dépassent la raison et ses timides limites. Même les parties de la connaissance religieuse qui semblent le plus ressembler aux opérations intellectuelles, font appel à des facultés illuminatrices qui ne sont pas l'imagination ni la logique ni le jugement rationnel, mais des révélations, des inspirations, des intuitions, des discernements intuitifs qui jaillissent d'un plan de lumière suprarationnel. L'amour de Dieu est un sentiment infini et absolu qui n'admet aucune limitation rationnelle et n’emploie pas le langage d'un culte rationnel ni d'une adoration rationnelle; la félicité en Dieu est une paix et une béatitude qui dépassent toute compréhension. La soumission à Dieu est une soumission de l'être tout entier à une lumière, une volonté, un pouvoir et un amour supra-rationnels, et le service de Dieu ne tient aucun compte des compromis avec la vie qui font l'essence de la méthode de la raison pratique de l'homme dans la conduite ordinaire de son existence mondaine. Certes, il existe toute une catégorie de pratiques religieuses qui sont hésitantes, imparfaites, à moitié sincères et pas très sûres d'elles-mêmes, et où la raison peut avoir son mot à dire; mais partout où la religion s'est vraiment trouvée, partout où elle s'ouvre à son propre esprit, sa voie est absolue et ses fruits sont ineffables.En vérité, la raison a un rôle à jouer vis-à-vis du domaine supérieur de notre être religieux et de son expérience, mais ce rôle est tout à fait secondaire et subordonné. Elle ne peut pas dicter les lois de la vie religieuse, elle ne peut pas fixer d'autorité les méthodes de la connaissance divine; elle ne peut pas styler l'amour divin et sa béatitude ni leur faire la leçon; elle ne peut pas assigner des bornes à l'expérience spirituelle ni imposer son joug à l'action de l'homme spirituel. Son seul rôle légitime est d'expliquer aux éléments rationnels et intellectuels de l'homme, aussi bien qu'elle le peut et dans son langage, les vérités, les expériences et les lois de notre existence supra-rationnelle et spirituelle. Telle a été l'oeuvre de la philosophie spirituelle en Orient, et d'une façon beaucoup plus fruste et beaucoup plus imparfaite de la théologie en Occident, et cette oeuvre est d'une grande importance à une époque comme la nôtre où l’intelligence humaine, après avoir longtemps erré, se tourne de nouveau vers la recherche du Divin. Cette philosophie spirituelle doit inévitablement recourir à certaines parties des opérations spécifiques de 1'intellect : raisonnement logique, déductions à partir déduction à partir de l'expérience rationnelle, analogies tirées de la connaissance des faits apparents de l'existence même aux vérités physiques de la science; bref à tout le mécanisme mental de l'intelligence dans son fonctionnement ordinaire. Mais c'est la partie la plus faible de la philosophie spirituelle. Elle ne convainc le mental rationnel que dans la mesure où l'intellect est déjà prédisposé à croire, et même si elle convainc, elle ne peut pas donner la connaissance vraie. La raison n'est sûre que lorsqu'elle se contente de prendre telles qu'elles sont les vérités et les expériences profondes de l'être spirituel et de la vie spirituelle, et qu'elle leur donne la forme, l'ordre et le langage qui peuvent les rendre les plus intelligibles ou les moins inintelligibles au mental raisonnant. Mais même là, son action n'est pas tout à fait sure, car elle a tendance à durcir l'ordre en un système intellectuel et à présenter la forme comme s'il s'agissait de l'essence". Le cycle humain , Buchet-Chastel.Indications de lecture:
Aurobindo
est un auteur plus spirituel que religieux.
Il est assez critique sur la religion. Se souvenir aussi qu'il brasse une
immense culture. Il a lu Nietzsche avec intérêt et il corrige très
clairement son vitalisme titanesque.
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