Textes philosophiques

Diderot    l'animal est sensible


       L'anatomie comparée nous montre dans les bêtes des organes semblables aux nôtres et disposés pour les mêmes fonctions relatives à l'économie animale. Le détail de leurs actions nous fait clairement apercevoir qu'elles sont douées de la faculté de sentir, c'est-à-dire qu'elles éprouvent ce que nous éprouvons lorsque nos organes sont touchés par l'action de objets extérieurs. Douter si les bêtes ont cette faculté, c'est mettre en doute si nos semblables en sont pourvus, puisque nous n'en sommes assurés que par les mêmes signes. Celui qui voudra méconnaître la douleur à des cris, qui se refusera aux marques sensibles de la joie, de l'impatience, du désir, ne mérite pas qu'on lui réponde. Non seulement il est certain que les bêtes sentent, il l'est encore qu'elles se ressouviennent. Sans la mémoire, nos coups de fouet ne rendraient pas nos chiens sages, et toute éducation des animaux serait impossible. L'exercice de la mémoire les met dans le cas de comparer une sensation passée avec une sensation présente. Toute comparaison entre deux objets produit nécessairement un jugement ; les bêtes jugent donc. La douleur des coups de fouet retracée par la mémoire balance dans un chien couchant le plaisir de courre un lièvre qui part. De la comparaison qu'il fait entre ces deux sensations naît le jugement qui détermine son action. [...] Ces idées acquises successivement par la sensation et la réflexion, et représentées dans leur ordre par l'imagination et par la mémoire, forment le système des connaissances de l'animal et la chaîne de ses habitudes.

 Encyclopédie, Article « Instinct », 1745-1772.

     

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