Textes philosophiquesHannah Arendt l'oeuvre d'art et l'objet d'usage"Toutes choses, objet d'usage, produit de consommation, ou oeuvre d'art, possède une forme à travers laquelle elle apparaît; et c'est seulement dans la mesure où quelque chose a une forme qu'on peut la dire chose. Parmi les choses qu'on ne rencontre pas dans la nature, mais seulement dans le monde fabriqué par l'homme, on distingue entre objets d'usage et oeuvre d'art; tous deux possèdent une certaine permanence qui va de la durée ordinaire à une immortalité potentielle dans le cas de l'oeuvre d'art. En tant que telles elles se distinguent d'une part des produits de la consommation, dont la durée au monde excède à peine le temps nécessaire à les préparer, et, d'autre part, des produits de l'actions comme les événements, les actes et les mots, tous en eux-mêmes si transitoires qu'ils survivraient à peine à l'heure ou au jour où ils appartiennent au monde, s'ils n'étaient conservés par la mémoire de l'homme, qui tisse en récits et puis par ses facultés de fabrication. Du point de vue de la durée pure, les oeuvres d'art sont clairement supérieures à toutes les autres choses: comme elles durent plus longtemps au monde que n'importe quoi d'autre, elles sont les plus mondaines des choses. Davantage, elles sont les seules choses à n'avoir aucune fonction dans le processus vital de la société: à proprement parler, elles ne sont pas fabriquées pour les hommes, mais pour le monde, qui est destiné à survivre à la vie limitée des mortels, au va-et-vient des générations. Non seulement elles ne sont pas consommées, ni usées comme des objets d'usages: mais elles sont délibérément écartées des procès de consommation et d'utilisation, et isolée loin de la sphère des nécessités de la vie humaine." La Crise de la culture, Folio, p. 267-268.Indications de lecture :Transmis par Stéphanie Lervet.
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