Textes philosophiquesShri Aurobindo le mental comme sixième sensEn un sens toute notre expérience est psychologique, puisque même ce que nous recevons par les sens n'a de signification et de valeur pour nous que traduit dans les termes du mental sensoriel, le manas de la terminologie philosophique indienne. Manas, disent nos philosophes, Manas le sixième sens. Nous pouvons même dire que c'est le seul sens et que les autres, vue, ouïe, toucher, odorat, goût, ne sont que des spécialisations de ce mental sen qui, tout en prenant normalement les organes sensoriels pour base de son expérience, les dépasse néanmoins et s'avère capable d'une expérience directe particulière à sa propre action inhérente. Il s'ensuit qu'en l'homme l'expérience psychologique, comme les cognitions de la raison, est capable d'une double action, d'une mélangée et subordonnées, l'autre pure ou souveraine. Soit action mélangée a généralement lieu quand le mental cherche à prendre conscience du monde extérieur, l'objet ; l'action pure, quand il cherche à prendre conscience de lui-même, le sujet. Dans le premier cas, elle est dépendante des sens et forme ses perceptions selon leurs données ; dans le second cas, elle agit en elle-même et prend conscience des choses directement par une sorte d'identité avec elles. C'est ainsi que nous sommes conscients de nos émotions ; comme on l'a dit si judicieusement, nous sommes conscients de la colère parce que nous devenons la colère. C'est ainsi également que nous sommes conscients de notre propre existence ; et là on peut constater que la nature de l'expérience est connaissance par identité. En réalité, toute expérience, en sa nature secrète, est connaissance par identité ; mais son vrai caractère nous est celé parce que nous sommes isolés du reste du monde en excluant, en distinguant entre nous-même en tant que sujet et toute autre chose en tant qu'objet, et nous sommes ainsi forcés d'acquérir processus et organes qui nous permettent d'entrer à nouveau en communion avec tout ce que nous avons exclu. Il nous faut remplacer la connaissance directe que donne l'identité consciente, par une connaissance indirecte qui semble causée par le contact physique et la sympathie mentale. Cette limitation est une création fondamentale de l'ego et un exemple de la manière dont il a toujours procédé, partant d'une fausseté initiale et masquant la vraie vérité des choses par des faussetés relatives qui en pratique deviennent pour nous des vérités dans le domaine des rapports. La Vie divine, t I, Albin-Michel, p. 91-92. Indications de lecture:
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