Textes philosophiquesAndré Gorz crise et effondrement d'une utopie"La crise est, de fait, autrement fondamentale qu'une crise économique et de société. C'est l'utopie sur laquelle les sociétés industrielles vivaient depuis deux siècles qui s'effondre. Et j'emploie utopie dans le sens que la philosophie contemporaine donne à ce terme: la vision du futur sur laquelle une civilisation règle ses projets, fonde ses buts idéaux et ses espérances. Qu'une utopie s'effondre, c'est toute la circulation des valeurs réglant la dynamique sociale et le sens des pratiques qui entre en crise. C'est cette crise que nous vivons. L'utopie industrialiste nous promettait que le développement des forces productives et l'expansion de la sphère économique allaient libérer l'humanité de la rareté, de l'injustice et du mal-être; qu'ils allaient lui donner, avec le pouvoir souverain de dominer la nature, le pouvoir souverain de se déterminer elle-même; et qu'ils allaient faire du travail l'activité à la fois démiurgique et autopoiétique en laquelle l'accomplissement incomparablement singulier de chacun est reconnu - à la fois droit et devoir - comme servant à l'émancipation de tous. De cette utopie, il ne reste rien. Cela ne veut pas dire que tout est désormais vain et qu'il ne reste qu'à nous soumettre au cours des choses. Cela veut dire qu'il nous faut changer d'utopie; car tant que nous resterons prisonniers de celle qui s'effondre, nous demeurerons incapables de percevoir le potentiel de libération que la mutation présente contient et d'en tirer parti en imprimant à cette mutation son sens". Métamorphoses du Travail, p.25. Folio, 1988. Indications de lecture:Voir la leçon pouvoir et utopie.
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