Textes philosophiquesHaritayana la confiance originelle et l'argumentation du sceptique"La foi est l'ordonnatrice des mondes, la foi est la vie de tous les êtres. Comment un enfant pourrait-il continuer à vivre en n'ayant pas confiance en sa mère? Si l'homme n'a pas confiance en son épouse, comment pourra-t-il trouver le bonheur auprès d'elle? De quel genre serait la sérénité du vieillard s'il n'avait pas confiance en ses descendants? Si le paysan ne faisait pas confiance à la terre, pourquoi se mettrait-il à labourer? Le sceptique n'agit plus, ni pour s'emparer d'une chose ni même pour l'abandonner. Sans al confiance, le monde entier irait à sa perte... Lorsque tu pense 'tel homme est bon, tel homme est mauvais' d'où tires-tu ta conviction? Or c'est seulement sur la base d'une telle conviction préalable que l'on peut parler du salut comme reposant sur la foi en la parole des gens de bien. Diras-tu que cette conviction, à son tout s'appuie sur des indices (lakshanas)? C'est alors en ces indices qu'il faudra mettre sa confiance. tu répondras peut être que les indices eux-mêmes sont tirés des moyens de connaissance droite (pramânas). Mais réfléchit à ceci : pour le sceptique (ashraddha), qu'est ce qui sera 'moyen de connaissance droite'? N'arrive-t-il pas que ceux qui se fient à ces moyens se contredisent entre eux? Concluons donc que tout comportement humain se fonde sur une certaine confiance originelle. ..Celui qui ne raisonne pas du tout et aussi bien celui qui raisonne à perte de vue ne parviendront jamais au Bien suprême, ni en ce monde ni dans l'autre... Jadis, dans la région des monts Sahya... Sunga intervint dans la discussion. Il était supérieurement intelligent et il réfuta avec pertinence les thèses défendues par les autres. Son esprit était perverti par l'absence de foi, mais c'était un habile dialecticien... il s'adressa à eux en ces termes : 'vous définissez le vrai comme ce qui est connu par les moyens de connaissance droite. Mais si ces moyens étaient affectés de quelque défaut l'objet ne serait pas connu dans sa vérité. Il convient donc, pour commencer, d'examiner la validité des moyens de connaissance droite eux-mêmes. Or ceci ne peut se faire qu'à l'aide d'autres moyens de connaissance droite lesquels, à leur tour, devront être examinés. On est ainsi entraîné dans une régression à l'infini (anatvastha) qui empêche de connaître quoi que ce soit. Ni le sujet connaissant, ni l'objet à connaître, ni la connaissance elle-même ne sont établis de manière valide. C'est pourquoi la diversité de nos représentations ne repose que sur le vide" Tripurarâhasya p. 69-70. traduction Michel Hulin, Fayard.
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