Textes philosophiquesHans Jonas la technique peut-elle spiritualiser le travail?" Pour autant que sous le signe de la technique tout travail du type "forgeron" évolue vers le type "horloger" on pourrait donc parler d'une "spiritualisation" croissante du travail humain comme tel et ensuite également d'une atténuation de "l'opposition" évoquée... Mais évolue-t-il vers cela? Le travail de celui qui ne fait que surveiller la machine, celui qui découpe en série un rouage d'horloge, ou la machine qui exécute une séquence dans l'assemblage des parties - et c'est là la prochaine étape du progrès!, - est-il plus "spirituel" que celui de l'horloger technologiquement dépassé qui fabrique le tout de manière artisanale? Au contraire! Il est spirituellement plus pauvre, à savoir dans la mesure même où il est physiquement plus pauvre! La perte de la variété physique (et d'effort!) va de pair avec la perte de l'activité spirituelle. Avec le corps l'esprit lui aussi est mis au chômage. La prétendue "opposition" n'en état en effet jamais une à l'intérieur de l'enceinte d'un travail déterminé; plutôt il y avait et il y a là un rapport de conditionnement mutuel: le commerce corporel avec la matière instruit le corps, les membres, les sens, les nerfs - et l'esprit, en les occupant tous, en leur faisant faire sa connaissance ainsi que celle de l'objet (l'un ne va pas sans l'autre!) et qui ne suscite les aptitudes latentes de cet équipement qui est le nôtre qu'à travers la résistance de la matière et l'apparition de ses qualités. La privation de cet élément les affame toutes. Réduire l'élément physique à des performances résiduelles uniformes, réduire l'élément cinétique à des "manipulation", réduire l'élément sensitif à la lecture de cadrans - réduit également la participation de l'esprit au travail." Le Principe responsabilité, Éd. du Cerf, 1990, pp. 374-375. Indications de lecture:Relier à Jacques Ellul et Ivan Illich.
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