Textes philosophiquesHans Jonas La fragmentation du savoir scientifique"En ce qui concerne la science, le caractère interminable de sa tâche et donc de ses possibilités est inscrit dans l'essence de l'objet de de la connaissance, (la nature) tout comme dans celle du la connaissance elle-même, et la poursuivre est non seulement un droit, mais une haute obligation du sujet de la connaissance... Or ce sujet n'est plus l'esprit individuel, mais de manière croissante rien d'autre que l'esprit collectif de la société qui stocke le savoir; et en cela consiste le prix interne du progrès scientifique, en l'occurrence celui de la qualité du savoir lui-même. Son nom est spécialisation; spécialisation qui, devant la multiplication gigantesque du matériau du savoir, de ses subdivisions et des méthodes spéciales développées pour elles, toujours plus subtiles, conduit à une fragmentation extrême du savoir total disponible entre ses adeptes. L'individu paie la participation créative au processus, et même déjà une authentique compréhension avertie de simple observateur, par le renoncement à partager la possession de tout cela, exception faite de son étroite compétence. ainsi, tandis que s'accroît le capital total du savoir, le savoir de l'individu devient toujours plus fragmentaire. Or nous parlons ici de ceux qui participent au processus de la science, des chercheurs et des experts eux-mêmes. en outre tout ce savoir devient toujours plus ésotérique, toujours moins communicable aux profanes, a ainsi exclu la majeure partie des vivants. Il se peut qu'un véritable savoir de la nature ait toujours été l'affaire d'une petite élite, mais on a le droit de douter que le contemporain cultivé de Newton ait été aussi démuni devant son oeuvre que l'homme d'aujourd'hui devant les mystères de la théorie quantique. Le gouffre s'agrandit et dans le vide qui se produit se répandent le savoir de substitution et la superstition". Le Principe Responsabilité p. 312-313.Indications de lecture:cf. Thèses d'Edgar Morin.
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