Textes philosophiques

Stephen Jourdain     Qui suis-je si ce n'est mon essence?


En tant qu’êtres humains, qu’individus terrestres, nous nous trouvons dans une situation dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle est étrange et paradoxale…

Moi, Pierre, Paul ou Jean … n’ai aucune part de responsabilité dans l’état de délabrement de mon intériorité. La faute en incombe entièrement à mon Essence spirituelle, à JE.

MAIS QUI SUIS-JE SI CE N’EST MON ESSENCE ?

A l’évidence innocent, je dois pourtant me déclarer coupable.

Je rechigne toujours à mêler l’idée morale à mes propos, mais cette fois tant pis !

En tant que qu’habitants de la Terre, en tant que foulant les scintillements et les dures aspérités de ce sol sacré, bref en tant que créatures, en tant que « type » ou « nana », nous sommes soumis à un impératif moral absolu : faire l’ascension de notre intériorité, de cette part de nous même purement immatérielle nommée esprit, jusqu’à atteindre notre Essence ; et ici, REPARER.

Notre Âme a failli. A tout instant, dans la pointe de présent pur de chacun de nos esprits, notre âme manque à la loi qu’elle s’est donnée et avec laquelle elle se confond : veiller la pensée qu’elle enfante. Comment cela s’appelle-t-il, enfreindre la convention librement consentie d’un jeu ? Tricher.

Notre ultime instance spirituelle triche.

N’ayons pas peur des mots ni du scandale absolu qu’ils font apparaître, quitte à voir se désagréger nos raisons habituelles d’espérer.

DIEU TRICHE !

Et c’est nous, ses enfant, c’est nous, l’Homme – considéré dans la seule réalité que le simple bon sens nous enjoint de lui prêter : l’Homme Intérieur -, qui payons les pots cassés. Et c’est à nous de réparer les dommages imputables au tricheur divin, de remonter jusqu’à lui comme à contre-courant de nous-même – et de mettre fin à l’arnaque.

Vous ne me croyez pas ? Les plus nuancés d’entre vous rêvent de me voir mourir de mort subite, sans souffrance, pour cause de lèse divinité ?

Question : Nul doute que jadis de tels propos vous eussent valu le bûcher… Moi, ils ne me choquent pas. J’ai toujours fait instinctivement la différence la plus stricte entre le Soi de l’expérience orientale, et le dieu unique des religions judéo-chrétiennes. J’ai trouvé dans votre livre « L’Autre Rivage », la réconfortante confirmation de cette discrimination, qui généralement sème l’épouvante. Vous y posez la question, à mes yeux absolument brûlante, et occasion d’une clarification décisive : « devenir ce que je suis profondément, soit, mais cette Vérité de mon être est-elle objet ou bien sujet, est elle un autre ou bien moi ? ».

Voici maintenant ma question : ce dérapage premier de l’âme est-il le fait de sa part personnelle, créaturielle, ou de sa part divine ?

Steve : De sa part créaturielle. (Encore qu’on puisse difficilement éluder la question : qui a voulu que l’âme-créature soit faillible ? Qui a introduit le risque dans le monde métaphysique ?)

D’où me vient ce savoir ? J’estime malhonnête un homme qui ne donne pas ses sources.

Je présente souvent, il est vrai, l’unité insécable JE comme issue de la fusion du principe Dieu et du principe créature. Mais que l’on ne s’y trompe pas ! Je n’éprouve aucun attachement pour cette idée et je ne crois pas en Dieu. Je ne vois, ou préfère ne voir, dans cette conceptualisation qu’un artifice intellectuel – hélas incontournable – pour bien décrire les faits touchant à notre origine spirituelle. JE-Dieu fait le réel ; JE-créature a pour vocation de générer l’irréel. Par quelle autre voie réussir à projeter enfin la lumière sur le contenu de l’adjectif mental, autrement dit sur la nature mentale ? Oui, à quelle autre conceptualisation recourir pour apporter cette information capitale : la nature mentale saine – j’allais dire sainte – est la nature irréelle ; la nature mentale malade, dévoyée, est la nature irréelle s’autoproclamant réelle.

Question : Si je vous comprends bien, l’idée de Dieu est pour vous un simple artifice opératoire, tel le zéro en mathématique… Alors, quel nom donner à la valeur infinie inhérente à la Conscience, à JE ?

Steve : moi.

Question : ça me paraît bien cavalier !

Steve : Pour les intimes, moimoi.

Question : J’aimerais savoir ce que moi (je n’ai pas la prétention d’être un intime) aperçoit dans toutes ces précisions si bien ciselées et si précieuses, que vous venez de nous apporter ?

Steve : Une pure pensée, RIEN, Pour ne pas dévaloriser entièrement la chose, disons une brise folâtre, un zéphir.

MOI, l’évidence perdue.

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