Textes philosophiques

Nisargadatta Maharaj    plaisir et violence humaine


Q : Une question encore. Pourquoi le plaisir finit-il dans la douleur ?

M : Le plaisir, comme toute chose, a un commencement et une fin. Ne vous promettez rien, n'ayez pas de regrets, et il n'y aura pas de douleur. C'est la mémoire et l'imagination qui causent la souffrance. Naturellement, la douleur après le plaisir peut être due au mauvais usage du corps ou du mental. Le corps connaît ses limites mais le mental ne les connaît pas. Ses appétits sont sans nombre et illimités. Observez votre mental avec une grande diligence car c'est là que se situent et vos aliénations et la clé de la libération.

Q : Vous n'avez pas complètement répondu à ma question : pourquoi les plaisirs de l'homme sont-ils destructeurs ? Pourquoi éprouve-t-il tant de plaisir dans la destruction ? L'intérêt de la vie se trouve dans la protection, la perpétuation et l'expansion d'elle-même. En cela, elle est guidée par le plaisir et la douleur. Quand deviennent-ils destructeurs ?

M : Quand le mental prend la main, qu'il se souvient et prévoit. Il exagère, déforme et oublie. Le passé est projeté dans le futur, et le futur trahit les espérances. Les organes de la sensation et de l'action sont poussés au-delà de leurs possibilités, et, inévitablement, s'effondrent. Les objets de plaisir ne peuvent pas nous procurer ce que nous attendons d'eux, ils s'usent ou sont détruits par un mauvais usage. Il en résulte un excès de douleur là où nous attendions le plaisir.

Q : Nous détruisons non seulement nous-même, mais aussi les autres !

M : Naturellement. L'égoïsme est toujours destructeur. Désir et peur sont deux états égocentriques. La colère se manifeste entre le désir et la peur, qui engendre la haine, et avec la haine, la passion de la destruction. La guerre, c'est la haine agissante, organisée, et pourvue de tous les moyens de mort.

Q : N'y a-t-il pas un moyen d'en finir avec ces horreurs ?

M : Quand plus de gens parviendront à la connaissance de leur nature réelle, leur influence, bien que subtile, prévaudra et le climat émotionnel du monde en sera tempéré. Les peuples suivent leurs chefs et quand, parmi ceux-ci, en apparaîtront de grands par le coeur et par l'esprit, totalement libérés de la recherche égoïste, leur impact sera suffisant pour rendre impossibles les grossièretés et les crimes de l'époque actuelle. Un nouvel âge d'or peut s'ouvrir, qui durera un temps pour succomber ensuite à sa propre perfection. Car le reflux commence toujours quand la marée est au plus haut.

Q : La perfection éternelle n'existe donc pas ?

M : Si, elle existe, mais elle inclut toutes les imperfections. C'est la perfection de notre nature propre qui rend chaque chose possible, perceptible, intéressante. Elle ne connaît pas la souffrance parce qu'elle n'a ni sympathie ni antipathie, qu'elle n'accepte ni ne rejette. La création et la destruction sont les deux pôles entre lesquels elle tisse son dessin toujours changeant. Libérez-vous des prédilections et des préférences, et le mental, avec son fardeau d'afflictions, ne sera plus.

Q : Mais je ne suis pas seul à souffrir. Il y a les autres.

M : Quand vous allez vers eux, chargé de vos désirs et de vos peurs, vous ne faites qu'ajouter à leur affliction. Libérez-vous d'abord vous-même de la souffrance, puis espérez être en mesure d'aider les autres. Vous n'avez même pas à espérer - votre existence en soi sera l'aide la plus grande qu'un homme puisse apporter à ses frères humains.

     Je suis, Les deux Océans, entretiens avec Maurice Frydman, trad. française, s. Josquin, p.296-297.

 

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