Textes philosophiques

Michel Serres       comparaison contrat social,  contrat naturel


    "On dirait que le règne du droit naturel moderne commence en même temps que les révolutions scientifiques, techniques et industrielle, avec la maîtrise et la possession du monde. Nous avons imaginé pouvoir vivre et penser entre nous, pendant que les choses obéissantes dormaient, toutes écrasées sous notre emprise: l'histoire des hommes jouissait de soi dans un acosmisme de l'inerte et des autres vivants. On peut faire l'histoire de tout et tout se réduit à l'histoire.

     Les esclaves ne dorment jamais longtemps. Cet intervalle prend fin à ce jour, où la référence aux choses nous rappelle violemment. L'irresponsabilité ne dure que pendant l'enfance.

     Dans quel langage parlent les choses du monde pour que nous puissions nous entendre avec elles, par contrat? Mais après tout, le vieux contrat social, aussi, restait non dit et non écrit: nul n'en a jamais lu ni l'original ni même une copie. Certes, nous ignorons la langue du monde, ou nous ne connaissons d'elle que les diverses versions animistes, religieuses ou mathématiques. Quand fut inventée la physique, les philosophes allaient disant que la nature se cachait sous le code des nombres et les lettres de l'algèbre: ce mot de code venait du droit.

     En fait la Terre nous parle en termes de forces, de liens et d'interactions, et cela suffit à faire un contrat. Chacun des partenaires en symbiose doit donc, de droit, à l'autre la vie sous peine de mort".

Le Contrat naturel, Champ Flammarion, p. 68-68.

 


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