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Textes philosophiquesGeorges Gusdorf le passage grec du mythos au logos
.Au
muthos primitif, qui raconte une histoire divine, se substitue peu à peu la
tentative d'interprétation rationalisée, d'où se dégagera l'exigence du
logos. Les formes anciennes de cette pensée font appel à des éléments
concrets, doués d'aspects qualitatifs : le feu, l'eau, l'air, la terre, mis
en œuvre par des forces telles que le chaud, le froid, l'humide ; plus tard
interviendront [59] d'autres principes d'intelligibilité, tels que l'amour
et la haine, l'être et le devenir, l'un et le multiple. Toutes ces
interprétations ont ceci de commun que, grâce à elles, « la puissance divine
se transforme en une nécessité naturelle [1] ».
Mais il s'agit toujours d'une réflexion cosmologique, au niveau de la
réalité dans son ensemble ; l'homme ne se distingue pas de cette totalité
qui l'englobe : ; il n'est pas un objet privilégié pour la réflexion. C'est
pourquoi on a pu dire que « les premiers philosophes de la Grèce n'ont pas
eu à résoudre le problème de la liberté, par cette excellente raison qu'il
ne se posait pas pour eux [2] ».
C'est seulement avec les Pythagoriciens, dont la doctrine du monde se fonde
sur une théorie des nombres, une sorte de mathématique sacrée, que la
destinée individuelle se dégage, d'une manière encore imparfaite, avec
l'idée d'expiation et la doctrine de la transmigration, apparentée aux
doctrines bouddhiques. Mais, comme la pensée orientale, le système
pythagoricien est un système du monde, d'inspiration astrobiologique, et non
pas une conception de l'homme centrée sur la conscience de soi et
l'individualité. Signification humaine de la liberté, p. 60. Indications de lecture:
[1] Léon ROBIN,
la Pensée grecque, Renaissance du Livre, 1923, p. 52.
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