Textes philosophiques

   "La science se fixe pour objectif l’approche du vrai, ou au moins du plausible, ce qui est insuffisant pour engendrer des valeurs et fixer les règles de la conduite bonne, déterminer ce qui sépare le bien du mal. L’adhésion à cette thèse du sophiste Protagoras est (et surtout a été) moins évidente qu'il n’y paraît. La notion de progrès. le Progrès avec un grand P, telle que l’idée s’en est imposée parallèlement aux révolutions scientifiques du xvue siècle, jouant un rôle considérable dans l'histoire de l’Occident du siècle des Lumières à nos jours, implique que le progrès des connaissances, aboutissant à celui des techniques, indispensable au progrès de l’économie, est facteur du progrès des sociétés, l’une des conditions de l’épanouissement de l’Homme.
     De ce fait, le progrès des connaissances et des techniques tend par essence vers le bien et le bon. Jean-Paul Sartre dira que le Progrès est « la notion d’une ascension qui rapproche l’homme indéfiniment d’un terme idéal » ; Victor Hugo le considérera comme « le pas collectif du genre humain » alors qu’Auguste Comte, chantre du positivisme, appellera de ses vœux un système ayant l’ordre pour base et le Progrès pour but, fondement de la république bourgeoise et de ses piliers - les policiers, les instituteurs et les savants.
     Le courant politique du progressisme sera largement fondé sur cette conception du Progrès considéré comme mouvement ascendant coordonné du savoir, des techniques et de la société...

     A la fin du XXe siècle, rares sont ceux qui, surtout en Europe, gardent la même foi dans le Progrès. Cette remise en cause est due au fait que. malgré l'essor des connaissances et des techniques, malgré les avancées considérables qui ont allégé le fardeau des Hommes, certains espoirs ont été déçus".

Et l'homme dans tout ça? , pocket, p. 104 sq.

    cf. in Théorie et expérience, ch. IV, Les Leçons du Temps, ch. V. Il y a des livres entiers consacrés à la critique du progrès, on en fait aujourd'hui un mythe. Mais attention, il faut distinguer les niveaux. Progrès moral, progrès technique, progrès scientifique, progrès esthétique, spirituel, tout cela est très différent. La croyance que le progrès scientifique et technique pouvaient entraîner les autres est morte. Nous savons que c'est une illusion. Il n'y a rien de contradictoire à ce qu'une société avancée dans la techno-science soit en même temps barbare et complètement inculte. Voir Michel Henry La Barbarie. Dans la théorie de la spirale dynamique (voir les trois leçons) la croyance dans le progrès version positiviste est portée par le niveau Même Orange qui reste très puissant en occident. En revanche, le Même Vert est plus lucide et critique.

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