Textes philosophiques

 Arne Naes     l'importance de l'empathie à l'égard du vivant


     « Les partisans du mouvement de l’écologie profonde ont ceci en commun qu’ils ressentent la vie et la mort des êtres vivants comme des événements qui les affectent, en vertu de sentiments de commune appartenance dont la force est liée à leur propre philosophie de la vie ou religion. Ils s’identifient avec ce qui est vivant - aussi différents qu’ils puissent être des êtres avec lesquels ils s’identifient. Une telle identification présuppose des affects, et, dans mon cas personnel, il est plus facile d’éprouver des affects positifs pour des êtres vivants particuliers plutôt que pour des espèces - lesquelles m’apparaissent quelque peu abstraites. Qui ne ressent de la douleur en voyant un animal souffrir? Face à un tel spectacle, des tonalités affectives sont en jeu. Le plaisir queprouve un animal suscite du plaisir chez ceux qui en sont les témoins oculaires. Je me souviens avoir lu dans un manuel de soin aux animaux domestiques des années 1930 que quiconque a vu un cochon exulter quand on le gratte derrière l’oreille ne pourra s’empêcher de recommencer chaque matin. Nous sommes poussés à le faire sans nous poser plus de questions, et l’expérience spontanée que nous faisons à cette occasion peut être adéquatement décrite comme nous l’avons fait précédemment: le plaisir de l’animal est bel et bien vu.
      Les relations humaines ne sont donc pas les seules à pouvoir nous inspirer une forme d’empathie et de compassion. Nous autres êtres humains avons la capacité singulière de pouvoir aisément nous identifier avec d’autres types d’êtres vivants. Au cours d’une telle identification, nous reconnaissons quelque chose de nous-mêmes dans l’autre être, ou, réciproquement, quelque chose de l'autre être en nous-mêmes. Cette expérience élargit la compréhension que nous avons de nous-mêmes, alors même que ce à quoi nous nous identifions peut se révéler extrêmement différent de nous-mêmes d’un point de vue biologique. L’une des tâches de la protection de la Nature en général est de contribuer à promouvoir et à généraliser une vision des êtres humains qui soit telle quelle fasse apparaître comme naturelle la considération des autres êtres vivants comme d’authentiques compagnons aspirant à se développer pleinement eux-mêmes".

Une écosophie pour la vie, Éditions Seuil, p.319-320.

Indications de lecture:

     Voir Philosophie de la Nature.

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