- Une abstraction, car l'individu n'a plus entre les mains une valeur en soi, il ne peut plus attribuer de sens au signe monétaire. Et ce n'est plus seulement la monnaie papier mais aussi la monnaie scripturale qui conduit à cette abstraction. L'individu ne s'attache plus au billet mais à son seul pouvoir d'achat. Le signe s'est rapproché de sa réalité économique en devenant lui-même plus abstrait.
- Une objectivation également, car l'on a de plus le sentiment que la manipulation de l'argent n'est pas un fait personnel, une appropriation, mais résulte de combinaisons lointaines et complexes dont nos actes ne sont que l'écho.
Il n'y a (donc) plus véritablement de relation entre l'individu et son argent parce que cet argent est (devenu) abstrait et objectif. Dès lors, il n'y a plus de problème moral de l'argent : (…) l'homme n'est plus responsable de ce qu'il gagne, ni du "comment il gagne", ni du « comment il dépense », car il s'agit uniquement (pour lui) d'un jeu objectif d'opérations économiques dans lequel (il se sent) très peu de chose.
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Réédition dans "Le défi et le nouveau", compilation de huit ouvrages, Jacques Ellul, éd. La table ronde, 2007, p. 199-200