Textes philosophiques

Fichte       la révolution n'est pas une rébellion


    "Toute personne privée qui, contre la volonté du pouvoir exécutif - dans lequel la volonté générale est déposée aussi longtemps que la communauté n’est pas rassemblée - convoque la communauté (et sera toujours une personne privée qui le fera puisque le pouvoir exécutif, selon la nature de la chose, ne veut jamais la convoquer), est un rebelle puisque, comme on l’a montré plus haut, sa volonté se dresse contre la volonté générale présumée et cherche à lui opposer un pouvoir. Mais - et cela mérite d’être remarqué - le peuple (qu’on comprenne bien que je parle de la totalité du peuple) n’est jamais un rebelle, et l’expression de rébellion, utilisée à son sujet, est la pire ineptie qu’on ait jamais proférée ; car le peuple est dans les faits et d’après le droit le pouvoir suprême, qu’aucun autre ne surpasse, et la source de tout autre pouvoir, responsable devant Dieu seul. Par le rassemblement du peuple, le pouvoir exécutif perd son pouvoir dans les faits et d’après le droit. C’est uniquement contre un supérieur que se produit une rébellion. Mais qui y a-t-il de plus haut sur terre que le peuple ? Il ne pourrait se rebeller que contre lui-même, ce qui est absurde. Seul Dieu est au-dessus du peuple ; pour pouvoir dire qu’un peuple s’est rebellé contre son prince, il faudrait admettre que le prince est un dieu - ce qui risque d’être difficile à montrer. Donc, ou bien il s’agit d’un cas tel que le peuple se soulève de lui-même unanimement, par exemple lors d’une occasion particulière où la violence saute aux yeux de façon trop horrible, et il juge les éphores et les détenteurs du pouvoir. (…) Jamais un peuple ne s’est soulevé ni ne se soulèvera comme un seul homme si l’injustice n’a pas atteint le dernier degré. (…) Ou bien, second cas : une ou plusieurs personnes privées incitent les sujets à se constituer en peuple ; elles sont alors, d’après la présomption, des rebelles (…). Soit maintenant la communauté se soulève à la suite de leur appel, soit elle ne le fait pas. Si le premier cas se produit, le pouvoir exécutif disparaît dans le néant, la communauté devient juge entre celui-ci et les incitateurs au soulèvement (…). Si la communauté considère leur appel comme fondé, leur volonté est confirmée par la volonté de la communauté déclarée après coup, elle devient la volonté vraie et générale. (…) Ils sont, par leur grand cœur et leur vertu, ceux qui ont assuré le maintien de la nation et des éphores naturels sans avoir été appelés à l’être. Si la communauté trouve au contraire que leur exhortation et leur plainte sont infondées, alors ils sont des rebelles et sont jugés comme tels par la communauté elle-même.

Indications de lecture:

Cf. Leçon penser la révolution.

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