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Stéphane Lupasco      Le dépassement de la contradiction et la logique


    « SC : Stéphane Lupasco, vos travaux de logique et de systémologie commencent à être bien connus surtout en France, et j’aimerais commencer par vous demander comment vous avez entrepris vos recherches, il y a déjà environ cinquante ans ?
Stéphane Lupasco : Mes thèses de doctorat ont été publiées en 1935. J’ai commencé par la physique et la biologie en Sorbonne, et je me suis intéressé tout de suite à la physique quantique. J’étais, à l’époque, un des premiers à m’y intéresser, à un moment où elle était très peu connue en France, c’est-à-dire à partir du quantum de Planck, à travers Einstein et Heisenberg, et jusqu’à toutes les sciences quantiques : la physique ondulatoire de Louis de Broglie et la physique des quanta de Bohr et de Heisenberg.
Comment, alors, à partir de ces recherches, avez-vous élaboré ce système ? car sûrement, vous êtes passé par des phases…
S.L. : Oui. Eh bien, j’ai constaté en abordant la physique quantique qu’on était en présence d’une contradiction, dès le départ, dans le quantum de Planck qui est hv, où h est une valeur arithmétique discontinue et v une valeur ondulatoire continue. Mais, en vertu de la logique classique, personne n’admettait la contradiction, car pour cette logique, deux termes contradictoires s’annulent.
Einstein, par ailleurs, créa la théorie de la lumière basée sur les quanta, en prenant le photon comme quantum. Là aussi, j’ai constaté que la lumière est à la fois ondulatoire et corpusculaire. Par la suite, on a constaté, grâce à des expériences célèbres comme celles de Davidson et Germer, que la projection d’un faisceau d’électrons sur un prisme produit derrière ce prisme, des phénomènes ondulatoires. J’ai montré, à partir de ce phénomène extraordinaire, que les tentatives des physiciens de tout ramener à l’onde en créant la mécanique ondulatoire, ou de tout ramener au corpuscule par la physique quantique, étaient dictées par la logique classique qui refuse de voir dans les faits que j’ai cités, la preuve que la contradiction est fondamentale dans la nature de l’énergie.
Donc, vous êtes parti de la constatation de l’existence d’une contradiction fondamentale dans le quantum même de Planck, mais après, vous avez construit un système et vous avez généralisé la contradiction à toute la nature; alors comment s’est fait ce passage ?
S.L. : J’ai fondé une logique qui était précisément une logique du contradictoire, c’est-à-dire que j’ai introduit les notions éclectiques de potentialisation et d’actualisation pour aboutir à une logique à trois valeurs, grâce à un jeu réciproque d’actualisation et de potentialisation de l’homogène et de l’hétérogène; l’homogénéité et l’hétérogénéité étant des phénomènes contradictoires, puisque l’un est fondé sur l’identité et l’autre sur la différence…

Extrait d’un entretien réalisé le 14 février 1987

Indications de lecture:

Voir Basarab Nicolescu. Stéphane Lupasco - L'homme et l'œuvre, Le Rocher, Monaco, 1999, en collaboration avec Horia Bădescu.

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