Textes philosophiques

Serge Carfantan      l'homme idéal n'existe pas


          C’est la compréhension qui importe par-dessus tout. La compréhension de la vraie nature de la vie, la compréhension des hommes tels qu’ils sont et non tels que nous voudrions qu’ils soient. L’homme idéal, cela n’existe pas. C’est peut-être même une contradiction interne, un oxymore. Il y a les hommes réels, avec leurs incertitudes, leurs limites, leurs faiblesses, leurs erreurs, leur ignorance et ce feu intérieur qui les pousse à donner le meilleur d’eux-mêmes, mais aussi leurs égarements et leurs sursauts, leurs ténèbres et leur lumière. Comme le souligne le chœur d’Antigone de Sophocle, il y a de la Philosophie de la moralegrandeur en l’homme,  mais il y a la difficulté d’être hu­main, le cheminement de l’aventure humaine. Cette simplicité qui rend l’être humain au fond si attendrissant. Exiger, à coups de juge­ments moraux, de l’homme réel qu’il soit idéal est très cruel. Il est ce qu’il est. Ni bon, ni mauvais. Dans le monde relatif, rien n’est absolu. Les hommes sont ce qu’ils sont, ils sont parfaits dans leur imperfection même, ils sont parfaits dans leur unique et originale singularité. Incomparables. Celui qui condamne sans cesse les hommes au nom de « l’homme idéal » et se répand en jugements moraux, n’aime pas les êtres humains tels qu’ils sont, parce qu’il ne les comprend pas. Il a mis le devoir-être à la place de l’être. Il exige beaucoup, et c’est son amertume qui lui dit que les hommes ne sont jamais à la hauteur. Et c’est de là qu’il tire sa férocité critique. Mais cette exigence tyrannique repose sur une erreur. L’erreur de mesurer l’être à l’aune du devoir-être. Plus on comprend une personne et moins on se permet de la juger. Une mère qui aime son enfant ne le juge pas. Elle l’accueille pour lui donner un nouvel élan et l’élan de l’amour fait davantage pour réparer et construire que les critiques acerbes. L’amour ne prononce pas de jugement et ne montre pas du doigt une faute. C’est l’intellect coupant qui pointe du doigt le reproche et plante le jugement moral. Ce n’est pas le cœur qui comprend et éclaire.

  Philosophie de la Morale   ch. V,  p. 104-105.

Indications de lecture:

    Le chapitre s'intitule : l'Etre et le jugement moral. Le PDF de la leçon est diponible. PDF de la leçon


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