Textes philosophiques

Serge Carfantan    l'illusionniste, le charlatan et l'imposteur


           ...Qu’est-ce qui distingue l’illusionniste du charlatan ? Le public qui se rend à un spectacle de magie sait qu’il va être abusé et le jeu consiste à chercher le « truc » qui rendrait compte de l’apparence incroyable dans le spectacle. L’illusionniste qui ne dévoile pas le truc est en fait honnête car nous savons que ce n’est qu’un spectacle, que ce n’est qu’un tour de magie, une illusion. À la différence, le charlatan ferait la même chose à la limite que l’illusionniste, mais sans que le public le sache et dans le but d’en tirer un profit. De faire de l’argent en trompant celui qui croit dans la mise en scène. L’homme véridique serait dans le juste milieu aristotélicien, ne cherchant ni à éblouir dans un jeu de scène, ni à tromper effrontément pour vendre on ne sait quelle camelote à des esprits crédules ; l’homme véridique coïncide exactement avec ce qu’il dit et ce qu’il fait.
        Et bien sûr, on peut répliquer cette même analyse dans tous les domaines :  En politique, dans le domaine scientifique, dans le domaine médical etc. L’imposteur se présente alors comme un cas extrêmement sérieux du charlatan et se distingue de l’illusionniste de spectacle. L’imposteur doit en effet sérieusement prendre la pose pour être un imposteur, la pose de ce qu’il n’est pas en vérité au point même d’en être persuadé et d’y croire. Tartuffe joue les gestes de la piété, donne le change dans une posture religieuse de la vertu, il joue de l’apparence vertueuse de manière suffisamment adroite pour qu’on puisse le croire. En même temps, et c’est très important, il s’adapte à merveille à ce que l’on attend de lui dans la figure de l’homme pieux. Il joue un personnage, mais ce personnage n’est pas ce qu’il est ; dans la maison, la belle a fait entrer un imposteur qui en vérité la convoite et la désire. « Cachez ce sein que je ne saurais voir » ! Le personnage est une manière de poser dans une identité sociale facile à reconnaître et qu’il lui faut dans ses manières sans cesse confirmer par maintes génuflexions de dévot. Il doit faire accréditer sa posture de feinte piété. L‘habileté avec laquelle l’imposteur parvient à confirmer son personnage, à donner le change, pas seulement sur le moment comme une audace prise pour la plaisanterie, mais dans une insistance dans la durée, comme un projet, c’est précisément ce qui fait l’imposture. L’imposteur fait tout pour être cru, pour être identifié dans l’image qu’il offre et dans l’image seulement, il s’est lui-même identifié à cette image au point de s’en faire une identité. Seule demeure l’image, au mépris du soi réel.  .

   Le système technicien et l'imposture, leçon 310. p. 1-2.

Indications de lecture:

    Cf. la leçon est centrée sur la technocratie en commentaire de Doland Gori. Le PDF de la leçon est diponible. PDF de la leçon


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