Cette leçon est une
interprétation assez libre des écrits de Jane Roberts, dont les livres se
sont vendus par millions. Elle écrit dans les années 1960 et c'est la
première représentante de ce qu'on va appeler ensuite un enseignement fondé
sur le channeling. La vision qu'elle présente de l'intériorité est tout à
fait remarquable. Sa lecture est très stimulante et d'un grand intérêt. Ses
écrits ont eu une influence énorme aux Etats Unis, sur Monroe, sur Richard
Bach et beaucoup d'autres. Les livres de Jane Roberts sont dans la
bibliothèque de tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à la
spiritualité. Ce sont des classiques. On remarquera en la lisant que
beaucoup d'auteurs contemporains la prolonge logiquement. Byron Katie,
Eckhart Tolle sont dans cette lignée.
Rappel : les dossiers envoyés en pièces
jointes sont plus complets que la leçon. Remerciements aux internautes qui
ont conseillé cette lecture.
Patrick Cresson:
Je viens de relire les livres « Être rien, c’est être tout » de Nisargadatta
et « Distinguer pour unir, les degrés du savoir » de Jacques Maritain (JM).
Ce dernier après avoir décrit « les degrés du savoir » en 3 sagesses :
métaphysique, théologique, et mystique, se pose la question de la légitimité
de la métaphysique, comme voie pouvant conduire à une expérience « mystique
authentique ». Et, sa réponse est négative. Car pour lui l’expérience
mystique est définie comme une « connaissance expérimentale des profondeurs
de Dieu » et implique une intervention divine. Pour lui la théologie
naturelle, c’est à dire la métaphysique, ne peut aboutir à l’« objet »
formel de la théologie révélée.
A cette époque JM qui s’intéresse aussi au Yoga,
réduit ce dernier à l’ordre naturel sans la possibilité d’un passage à
l’ordre surnaturel. Ce qui ne lui permet pas de reconnaitre le yoga comme
une « mystique authentique ». Mais sa rencontre avec Olivier Lacombe, qui
s’intéresse aux traditions sacrées de l’Inde, va le conduire à reconnaitre
le yoga et la métaphysique indienne comme une 4ième sagesse, donnant la
possibilité d’une réalisation authentique mais d’ordre naturel. Jacques
Maritain en 1938 au 4ième congrès de psychologie religieuse apporte « un
complément et une correction » à certaines pages du chapitre VI des ‘’Degrés
du savoir’’. Dans une conférence sur ‘’L’expérience mystique naturelle et le
vide’’, il reconnaît l’expérience contemplative par le yoga comme une
expérience mystique authentique, mais d’ordre naturel. Il dit « nous croyons
maintenant qu’une réflexion suffisamment attentive sur la contemplation
hindoue oblige à reconnaître la possibilité…d’un ‘’contact’’ avec l’absolu,
et d’une expérience improprement ‘’immédiate’’, …, de Dieu créateur et
auteur de la nature. Ce n’est pas une expérience des profondeurs de Dieu,
une expérience de la déité, et en ce sens nous maintenons tout ce que nous
avons écrit…Mais c’est une expérience de Dieu, indirectement atteint dans le
miroir de l’ (exister) [esse] substantiel de l’âme ». Jacques Maritain
précise que c’est en procédant par voie de néantisation, direction inverse à
la réflexion comprise au sens habituelle du terme, par retour de soi vers
soi, en faisant table rase du ‘moi’, par un dépouillement total de toute
image ou représentation particulière, qu’on saisit la méthode propre aux
mystiques de l’Inde et la finalité qu’elle induit ; la saisie d’un absolu
immanent saturant la conscience (dans une enstase). Louis Gardet , un autre
ami de J. Maritain précise « il ne s’agit pas d’une voie naturelle
pour atteindre un terme surnaturel : ce serait un non-sens. Il s’agit d’une
voie naturelle pour atteindre un terme naturel, qui est cependant un absolu
et, pour l’homme, un mystère : le mystère de l’exister substantiel de l’âme
comme esprit ».
1- Etes-vous d’accord avec la conclusion de
ces deux auteurs pour qui l’expérience spirituelle du yoga (au sens large de
l’ensemble des voies spirituelles de l’Inde) aboutit au mieux à la Présence
d’Immensité ou au Pur Acte d’Exister, sans pour autant permettre la
réalisation terminale, i.e. « l’expérience » des profondeurs du
Dieu Transcendant ?
2- Nisargadatta Maharaj précise dans le livre « Être rien, c’est être
Tout » p.74 les étapes importantes de la réalisation spirituelle. Il dit : «
Atman n’est pas juste un mot, mais ce que l’on est en réalité. On perd son
individualité et on demeure comme le Soi. Notre sentiment d’exister lui-même
est le Brahman dynamique ou la Maya. Votre existence sans le sentiment
d’être est le Parabrahman ou l’Absolu ». Est-ce que cette description ne
donne pas raison à l’analyse de Jacques Maritain (cf. question 1) ?
Amitiés Patrick
R. Non. Il faut bien voir
que le point de vue de Maritain est celui d'un thomiste
doctrinal, mais vraiment doctrinal au sens du dogme. Il en
reste à la position classique de repli qui consiste à opposer le Dieu
transcendant des Chrétiens à l'horreur du Dieu immanent des Indiens, coupure
classique entre le créateur et le créé avec la déchéance du péché originel
sur le crée qui interdit l'unité avec le Divin et proclamme la séparation
comme réalité ontologique. Assez banal chez tous les universitaires
chrétiens, on retrouve cela chez Ricoeur et même parfois chez Ellul. Ils ont
une terreur bleue devant l'Unité divine. Alors ils s'en moquent parlant
d'uen "recherche de la fusion". Du "sentiment océanique" du bébé dans le
ventre de la mère. Le présupposé initial est la croyance dans la séparation.
En plus, les religieux ont du mal avec la mystique qui n'est pas de leur
bord, au lieu de percevoir l'unité, ils cherchent alors la différence en
s'attribuant pour eux-même la supériorité du dogme en matière de vérité. On
ne peut pas attendre de Maritain qu'il comprenne le Vedânta, il reste dans
le mental et ne voit pas la nécessité de transcender sa propre religion.
C'est subtil chez les penseurs chrétiens, cela devient grossier chez les
intégristes chrétiens. Sur le Net vous trouvez des gens pour dire que le
yoga est impie et mauvais pour les croyants, à rejeter comme l'horrible
polythéisme hindou, le zen, le Gi-gong, l'ayur-veda etc. Prière et
confession comme exercice spirituel point barre ! pour le reste vade retro
satanas!
Maharaj a laché les amares
de toute religion et ne parle que sur fond de la conscience d'unité et dans
cette pleine conscience, il n'existe pas de séparation créateur-créé, parce
que la dualité créateur/créé n'existe pas. Le foyer
réel de l'Identité est universel, faire l'expérience du Soi, c'est sentir
que cette Vie qui palpite partout dans l'univers est la mienne. Il existe un
niveau subtil, celui de l'Etre où je peux faire l'expérience de la Realité
universelle d'une Identité cosmique qui est totalement mienne, ma
réalité. Tout le reste est illusoire et en particulier ces histoire de
péché originel, de séparation etc. Nous sommes de pleins pieds dans la
conscience divine, à la fois transcendant à ce monde (être dans le monde,
mais ne pas être de ce monde), et en même temps présent dans une fenêtre
d'espace-temps-causalité en tant qu'humain. L'expérience de la conscience
d'unité, la conscience de Brahman est le niveau le plus élevé que l'être
humain puisse atteindre. Mais attention, il existe des plans supérieurs à
l'humain, avec la possibilité d'états de conscience plus élevés, angéliques,
mais cela ne nous regarde pas tant que nous sommes incarnés comme humains.
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