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Textes philosophiquesNormand Baillargeon la généralisation hâtiveComme son nom l´indique, ce paralogisme consiste à généraliser trop vite et à tirer des conclusions à propos d´un ensemble donné à partir d´un trop petit nombre de cas. Lorsqu´il est commis, les cas invoqués pourront bien être pertinents à la conclusion avancée : mais c´est leur rareté qui fait problème. Dans la vie de tous les jours, ce paralogisme prend souvent la forme d´un argument anecdotique, c´est-à-dire qui invoque une ou des anecdote(s) ou une expérience personnelle pour appuyer un argumentaire. «Tous les patrons sont des margoulins : je le sais, j´en connais plusieurs» est une généralisation hâtive. Tout comme : «L´acupuncture, ça marche : mon frère a arrêté de fumer en consultant un acupuncteur». Pouvoir tirer des conclusions concernant un ensemble donné à partir de l´observation d´un nombre limité d´instances de cet ensemble est pourtant à la fois souhaitable et nécessaire. Nous voulons en effet pouvoir soutenir des conclusions générales, et cela même si l´observation de tous les cas est impossible et si l´observation d´un très grand nombre de cas est impraticable. Nous voulons, dira-t-on, pouvoir induire des conclusions générales de cas particuliers. L´art de tirer de telles conclusions légitimement est devenu, sous les noms de théorie de l´échantillonnage et d´inférence statistique, une branche des mathématiques et plus précisément de la statistique : nous en traiterons au chapitre suivant. Son étude constitue le meilleur des antidotes à la généralisation hâtive. Dans tous les cas, le penseur critique reste sceptique devant les généralisations et se demande, avant de les accepter, si l´échantillon invoqué est suffisant et représentatif.
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