Textes philosophiques
Stephen Jourdain Ce qu'est l'esprit
"L’esprit… Il en est de ce mot-clé comme
des quelques autres mots-clé : si transparent, si évident que soit son sens
pour notre intuition, il se montre absolument rebelle à la définition. On ne
peut le définir que négativement. Dire ce qu’est l’esprit, non ; dire ce
qu’il n’est pas, oui. Ce qui n’est déjà pas si mal !
Tout de même, il est une manière de faire référence positivement à la nature
de l’esprit. Elle n’est guère satisfaisante intellectuellement, c’est
vraiment le moins qu’on puisse dire ! Mais elle est peut-être parlante :
L’esprit commence au moment où l’esprit s’éprouve comme esprit.
e sens du mot sujet peut être abordé directement dans les même termes : le
sujet commence d’exister au moment où il s’éprouve lui-même comme sujet.
C’est ce qu’on peut dire de moins bête sur l’esprit et le sujet.
Dans cet éclairage, devenir un esprit, c’est se reconnaître en tant que tel.
Alors, qu’est-ce que, fondamentalement, l’esprit n’est pas ?
L’esprit n’est pas matière. L’esprit est irréductible à tout phénomène
matériel, quel que soit son degré de fluidité. Toute conception assimilant,
si peu que ce soit, l’esprit à une matière, est perverse, c’est un crachat
adressé directement à ce principe sacré qu’est l’esprit. C’est la raison
pour laquelle je me hérisse quand j’entends parler de corps fluidique ou
astral.
Il n’est pas suffisant de dire que l’esprit est immatériel, on doit aller
plus loin. L’esprit est irréductible à tout phénomène spatial. L’esprit est
fondamentalement immatériel et inétendu. Dans la mesure où nos sensations
nous apparaissent comme engagées dans l’étendue, l’on doit affirmer que la
part authentiquement spirituelle de nous-même est fondamentalement
non-sensorielle. Quand cette triple intuition est là, l’esprit est là. Si
elle est défaillante, l’accès à l’esprit nous est barré.
L’esprit est donc à jamais in-situé, et in-situable.
L’esprit n’a donc ni forme ni couleur ni consistance d’aucune sorte.
Et au fait, qui est l’esprit, l’esprit pur ?
L’esprit est moi.
Il faut ajouter que l’esprit existe sous deux états : un état A s’imposant
nécessaire et absolument premier, qui correspond à ce qu’on entend
couramment par ‘esprit pur’ et ‘âme’ ; et un état B s’imposant, lui à
l’intelligence comme complexe, contingent et second, qui correspond à ce
qu’on entend couramment par ‘mon esprit’ pouvant être évoqué plus
poétiquement comme celle qui unit la source et l’eau qui jaillit d’elle… Une
autre manière plus décisive d’évoquer cette même relation est de dire que
‘mon esprit’ est la pure imagination de l’esprit pur’ ou ‘âme’.
Mon esprit, siège de tous les phénomènes intellectuels et mentaux n’est pas
moins immatériels et inétendu que l’esprit pur. Contrairement à l’idée
reçue, ‘mon esprit’ est de pure nature spirituelle.
Alors, que trouve-t-on dans ‘mon esprit’, dans ‘un esprit’ ?
On y trouve un sujet, qu’on doit qualifier de second relativement à ce sujet
premier qu’est l’esprit pur, ou âme et qu’on peut utilement se représenter
comme la résurgence du sujet premier.
Ce sujet accomplit un certain nombre d’actes qui lui sont propres, et qui
correspondent, en gros, aux différentes facultés intérieures que nous nous
reconnaissons. L’acte de la pensée, bien sûr, vient en bonne place, parmi
ces actes et, à mon avis, intervient une seconde fois dans cette activité
interne en la sous-tendant entièrement ».
Stephen Jourdain Voyage au Centre de soi,
p. 71-72.
Indications de
lecture:
cf. Leçon
Le corps, l'âme et l'esprit.
A,
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