Textes philosophiques

Abraham Maslow   Ne pas limiter la créativité à l'art


     "J’ai été contraint de réviser mes idées sur la créativité il y a environ quinze ans, lorsque j’ai commencé à étudier des sujets qui étaient positivement sains, hautement évolués et mûrs : accomplis. L’évolution qu’elles ont connue depuis devrait sans doute se poursuivre. Il s’agit donc ici du témoignage de cette progression qui possède un intérêt non seulement compte tenu de la spécificité du sujet traité, mais aussi parce qu’il a inauguré un changement dans ma conception de la psychologie et de ce qu’elle devrait être.

Les idées préconçues

         Il m’a fallu renoncer à ce stéréotype selon lequel la santé, le génie, le talent et la productivité étaient synonymes les uns des autres. Une large proportion de mes sujets, bien que sains et créatifs dans un certain sens que je décrirai, n’étaient pas productifs au sens traditionnel du terme, ne possédaient ni talent, ni génie, n’étaient ni des poètes ni des compositeurs ni des inventeurs ni des artistes ou des intellectuels créatifs. Et à l’évidence, certains des plus grands talents de l’humanité n’étaient probablement pas psychiquement sains, tel Wagner par exemple, ou Van Gogh, Degas ou Byron. Il est clair que certains l’étaient, et que d’autres ne l’étaient pas. J’ai dû très tôt parvenir à la conclusion que le grand talent est non seulement plus ou moins indépendant de la bonté, de la santé de la personnalité, mais également que notre connaissance sur ce sujet est limitée. On sait, par exemple, que le talent pour la musique et les mathématiques relève plus de l’hérédité que de l’acquis. Il paraissait évident dès lors que la santé et le talent représentaient des variables distinctes, dont on ne pouvait déterminer s’ils étaient faiblement ou non corrélés. Et aujourd’hui, nous devons tout autant admettre que la psychologie sait peu de chose de ce talent singulier qui se manifeste dans le génie. Je n’irai pas plus loin et me concentrerai sur cette forme de créativité largement répandue qui constitue l’héritage universel de tout être humain dès sa naissance, et qui se chevauche avec la santé psychique. En outre, j’ai rapidement découvert qu’à l’instar de la plupart des gens, j’avais inconsciemment limité la créativité aux réalisations des hommes dans certains domaines traditionnels. C’est-à-dire que j’ai inconsciemment supposé que chaque peintre menait une existence créative, chaque poète, chaque compositeur. Les théoriciens, les artistes, les scientifiques, les inventeurs, les écrivains pouvaient être créatifs. Personne d’autre ne possédait cette faculté. Vous en étiez ou bien vous étiez exclu, tout ou rien, comme si la créativité était la prérogative unique de certaines professions".

Devenir le meilleur de soi-même, Eyrolles.

Indications de lecture:

Voir le texte suivant pour la suite. Remarque de Michel Lacroix : « Le souci de Maslow fut de découvrir non pas le mécanisme des névroses, mais le secret des hommes exceptionnels. Avec lui, on est sur les cimes… respirant l’air de ce que Nietzsche appelait la « grande santé », où se devine la silhouette du « surhomme ».

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