DocumentJean Staune Quatre fissures dans les murailles du matérialisme"Néanmoins, sous les coups de bélier de celui-ci, quatre fissures de taille apparaissent dans les murailles. Considérons la première tissure : s'il existe de nombreuses interprétations de la physique quantique, aucune ne repose sur des concepts « comparables à l’expérience que nous avons au niveau macroscopique des corps et des forces que nous appelons matérielles ». La deuxième provient du fait que, si l’on ne sait pas ce qu'est la matière, comment être sûr qu'elle n’a pas les caractéristiques de l'esprit ? La troisième vient de ce que, pour la physique, il y a une autre réponse possible à la question de Comte-Sponville : la matière et la conscience peuvent provenir toutes les deux de quelque chose d'autre et sont ainsi placées sur un pied d'égalité, aucune n’engendrant l'autre. Sans être prouvée par la physique, cette hypothèse semble la plus probable. Non seulement un dissident de la physique quantique orthodoxe tel que David Bohm la soutient (la dernière partie de son ouvrage fondamental s'intitule « La matière, la conscience et leur base commmune) mais même quelqu'un tel que Hervé Zwirn, qui est loin d'être un spiritualiste, écrit : « La conscience n’est pas un objet physique si l’on considère qu’elle est dans le même rapport aux neurones que l'est un calcul aux puces d’un ordinateur [...]. A partir de là, il est naturel de postuler que la conscience n'a pas à être soumise aux lois de la physique'. »
Cette faille pourrait être comblée en déplaçant le problème et en nommant «
matière » cette nouvelle entité qui serait à l’origine de la matière et de
la conscience, après avoir noté, à juste titre, que la physique ne nous
indique pas que les caractéristiques de cette entité se rapprochent de
celles d’un esprit, ce qui empêcherait alors de lui décerner cette
appellation'. ...il ne reste a priori que le réalisme non physique. Or celui- ci repose sur une ontologie de type platonicien comme le souligne Bernard d’Espagnat : « Les Idées de Platon ne sont pas dans l’espace-temps mais elles existent indépendamment de l’esprit humain et sont les causes des phénomènes, (’’est pourquoi on parle parfois, à propos du platonisme, de réalisme des essences. En ce sens-là (une réalité indépendante lointaine, probablement non située dans l’espace-temps), le réalisme philosophique d’un physicien peut difficilement ne pas être un peu platonicien". Notre existence a-t-elle un sens? p.98-99. Indications de lecture :Cf. Connaissance de la Totalité.
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