Commençons par préciser le sens des termes pour bien savoir où nous allons. Par
science nous entendons l’approche
objective de la connaissance, approche qui se subdivise en trois catégories bien
différentes, à savoir les sciences eidétiques comme
les mathématiques et la logique, qui ont affaire à des idées, des concepts, sans
que soit impliqués l’expérience. Les sciences de la Nature
avec la physique, la biologie, l’astronomie etc. et toutes leurs subdivisions.
Sciences qui ont partie liée à l’observation et l’expérimentation.
Sciences humaines enfin, histoire, psychologie, sociologie,
économie politique et leurs subdivisions dont le concept d’objectivité et les
méthodes diffèrent entièrement des sciences de la Nature. Songeons par exemple à
l’opposition radicale dans la manière dont peuvent établir la vérité un
historien ou un physicien.
Dans toutes les
discussions qui mettent en jeu la relation entre « la » science et autre chose
(la morale, l’art, la religion, la magie etc.)
il est admis
implicitement que
la physique sert
toujours de modèle de comparaison. Toutefois,
Ken Wilber classifie les avenues de la connaissance
en quatre quadrants,
physique et biologie occupent le quadrant SD, supérieur droit et il est très
clair depuis la Modernité que le quadrant SD sert toujours de référence de
comparaison, mais aux dépends des trois autres.
Le mot
religion, dans ce qui suit sera
pris dans son acception usuelle : à savoir un corps de doctrines du salut qui se
propose comme lien (ligare) renouvelé (re) entre l’homme et le Divin, ce qui ne
va pas sans la Foi, l’existence de rituels, une représentation du péché et de la
vertu, un sens de la piété et du sacré, une communauté de fidèles. Attention
cependant à ne pas faire l’amalgame entre religion et
credo.
Les monothéismes sémitiques (judaïsme, christianisme, Islam), sont des religions
du credo, mais il existe toutes sortes de religions
sans credo
(la religion grecque et romaine, l’hindouisme, le
bouddhisme et l’immense variété des religions animistes). En Occident, le credo
fait référence à un texte sacré qui fait
autorité
pour les croyants (la Thorah, le Nouveau Testament, le
Coran, le Livre des Mormons etc.) Les religions du Livre révèrent le Livre saint
comme la parole de Dieu. Quand on parle de religion en Occident, c’est toujours
en pensant à une religion du credo.
Ceci
dit, s’agissant de la relation entre science et religion, le problème est
surtout celui des religions du credo face à la science, pour une raison toute
simple : le croyant estime que la Vérité a été révélée par Dieu dans le Texte
saint et si une vérité différente se présente qui s’y oppose, elle ne saurait
être qu’impie. La question est de savoir où est placée l’autorité.
La religion peut-elle disposer d’une
autorité sur la vérité différente de celle de la science ?
Ken
Wilber dans
The mariage of Sens and Soul,
distingue cinq positions possibles. Par commodité, nous allons adopter cette
classification dans le plan qui suit.
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La position
typiquement fondamentaliste :
L’Ecriture sainte est la seule Vérité
en ce monde, car elle émane de Dieu qui est la seule autorité en matière de
Vérité. L’homme religieux doit rester fidèle à la parole de l’Ecriture et
vivre conformément à ce que la parole de Dieu enseigne. D’où une
interprétation stricte et littéraliste des textes sacrés. La science
est le plus souvent critique envers la religion, elle est impie et doit donc
être rejetée et surtout rejetée comme autorité.
La physicienne
Faouzia Charfi, de l’université de Tunis, note que certains de ses étudiants
rejettent des théories scientifiques lorsqu’elles paraissent contraires à ce
qui est écrit dans le Coran. Par exemple, la lumière étant une manifestation
de la présence divine, elle ne peut avoir de vitesse ! Par contre, si une
théorie paraît bien établie, comme celle du bigbang, ils soutiennent qu’elle
avait… déjà été prédite par le Coran. Dans le même registre,
les Américains
ne peuvent être allés sur la lune puise qu’il est écrit dans le Coran que la
lune est à 500 années de marche en chameau. Comme le Coran proscrit la
figuration du corps humain, les Talibans interdisent les illustrations
anatomiques dans les manuels d’enseignement de la médecine.
Pour les
fondamentalistes, la science veut nous faire croire que la Création relève
du hasard, que l’homme descend du singe, que notre planète est perdue dans
l’espace et que la Terre est ronde. Il s'agit là de mensonges véhiculés par
l'élite laïque pour que l'homme s'éloigne de sa nature originelle et doute
de l'existence du Tout Puissant. La Bible dans les proverbes dit :
« Il n’avait encore fait ni la terre, ni les campagnes, Ni le premier atome
de la poussière du monde. Lorsqu’Il disposa les cieux, j’étais là ;
Lorsqu’Il traça un cercle à la surface de l’abîme ». Dans « Isaïe 40
: 22) C’est Lui qui est assis au-dessus du cercle de la terre » Or un cercle
est une surface plane à deux dimensions. Dans Job 38:13 ) …Il est
question de « saisir les extrémités de la terre, afin qu’en soient secoués
les criminels ». Mais il n’y a pas d’extrémité à une sphère… donc ce doit
être que la terre est plate. Et puis, l’horizon, c’est une ligne etc. Il
parait que 9% des français croient « possible que la Terre soit plate et non
pas ronde comme on nous le dit depuis l'école ». Mais aux Etats-Unis, les
terreplatistes seraient environ 12 millions. Cela n’est possible qu’à
partir de croyances religieuses, car ce n’est pas du tout une
question de choix raisonné de l’opinion.
Pourquoi la
science devrait-elle être rejetée ? Réponse intégriste pure et dure : Dans
l'ancien testament Satan a corrompu Adam et Eve et leurs faisant manger le
fruit de la connaissance, la science cherche la connaissance, elle est donc…
satanique. Les grands organismes scientifiques sont athées et prônent
l'athéisme, la science est l’ennemi de la religion. Le siècle des
Lumières a
été inspiré par les ennemis de Dieu ! Il faut revenir à l’Ecriture sainte au
pied de la lettre. Il existe dans toutes les exégèses monothéistes
fondamentalistes des mises en garde sévères contre ceux qui voudrait amender
l’Ecriture, car il faut la prendre telle quelle, intégralement, donc
en intégriste fidèle à la Vérité révélée par Dieu.
Ce qui inclut entre autres… les règles de vies, les lois et les châtiments.
Bref, dans cette
position, pas de nuance, c’est la radicalité qui prime. Comme la
religion du
credo a un très fort accent dualiste en bien/mal, il
n’y a que des raison/tort, et la radicalité mène droit à l’intolérance.
Toute discussion dérape du jugement de fait, vers le jugement de valeur. Et
sur ce terrain, c’est bien simple, les fondamentalistes sont persuadés
qu’ils sont les seuls détenteurs de la vérité. Le doute,
instrument indispensable dans le travail scientifique, qu’il soit d’ordre
moral, existentiel, ou méthodologique n’a pas lieu d’exister, il doit être
dissipé pour laisser place à la foi. Donc, adieu l’esprit
critique. D’où la lecture au premier degré des textes, lecture
qui rejette toute interprétation historique et toute
explication
scientifique. La croyance est fixée pour l’éternité. Le texte sacré est
découpé en extrait et cité hors contexte, comme si tout ce qu’il contenait
était une sagesse. Pour la même raison, il est hors de question de faire
valoir l’autonomie du jugement et de penser par soi-même,
la vraie religion est hétéronomie, car soumission à Dieu dans la soumission
à la communauté des fidèles.
Il n’y a donc ici
aucune argumentation philosophique sérieuse. En résumé, selon l’historien
Mark Noll (lui-même de confession évangélique) : « Il n’y a pour ainsi dire
aucune philosophie fondamentaliste, aucune histoire des sciences
fondamentaliste, aucune esthétique fondamentaliste, aucune critique
littéraire fondamentaliste, et aucune sociologie fondamentaliste ».
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Questions:
© Philosophie et spiritualité, 2020, Serge Carfantan,
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