Nous avons vu que l’intentionnalité est le thème central de la phénoménologie de Husserl. En fait, Husserl reprend une découverte de son maître Brentano qui considérait l’intention comme la première caractéristique du psychisme. (texte) L’intentionnalité désigne le fait que toute conscience est conscience-de-quelque-chose, de sorte que toute expérience consciente, tout vécu, se situe dans une relation sujet-objet. Ainsi, percevoir, imaginer, croire, juger, se souvenir, c’est percevoir imaginer, croire, juger, se souvenir de quelque chose ; le sujet ne semblant dès lors exister que par rapport à l’objet dont il est conscient.
Cependant, quand nous parlons de l’intention, nous n’avons pas du tout en vue cette dualité sujet/objet, ou l’idée d’une structure relationnelle sujet-objet. L’intention ne se trouve pas dans la conscience-de-quelque-chose, mais au fond de nous-mêmes, dans la conscience-de-soi, comme la première étincelle, le premier germe d’énergie et d’intelligence qui donnera par la suite le désir. Tout désir commence par une intention, ou autrement dit ; le pouvoir de l’intention oriente un courant de conscience susceptible d’être converti en désir. Il existe une puissance secrète et créative de l’intention. Dans une précédente leçon, nous faisions la critique du velléitaire, en disant que la puissance du désir se défait quand il est trop exposé. Nous disions qu’un vrai désir est comme une graine qui dort dans l’obscurité de la terre, jusqu’au moment où elle jaillit au dehors pour donner la pousse, la tige, puis enfin la plante et le fruit. Si on extrait tout le temps la graine de la terre, pour voir où elle en est… on l’empêche de germer ! Le pouvoir de l’intention est semblable à la graine dans la terre. Il y aurait donc tout lieu de distinguer entre intentionnalité, telle que la phénoménologie l’a décrite dans les formes du vécu, et cette étrange pulsation de la conscience qui, dans l’Invisible, est à la racine du désir : l’intention.
Mais, dans ce cas, l’intention ne dit-elle pas plus de choses sur la conscience, que l’intentionnalité ? En quoi le désir est-il le résultat d’une intention ? L’intention est-elle la conscience du désir lui-même ou le processus inconscient qui conduit au désir ?
* *
*
Le mot
intention implique celui d’intentionnalité, qui, dans la langue
française devrait vouloir dire « l’essence de » l’intention. En latin le
mot original est intentio. Les Scolastiques du
Moyen-Age avaient observé que les phénomènes psychiques portent en eux
l’intention vers l’objet.
Brentano au XIX ème reprend cet héritage, que s’approprie ensuite
Husserl. Pour le problème qui nous occupe, il est important
d’examiner d’abord
comment l’intentionnalité peut être comprise. Nous avons dans les leçons
précédentes, étudié longuement la dualité sujet/objet au sein de la
vigilance. Or l’intentionnalité,
en montrant qu’en fait il y a dans tout acte de conscience une relation
sujet-objet, apporte déjà une correction de la dualité présente dans l’attitude
naturelle. L’idée de relation est importante, elle
implique un lien, une unité et pas de dualité.
1) Pour Brentano, il s’agissait de distinguer les faits physiques des faits psychiques. Nous avons vu cette question avec Dilthey. Pour définir un acte intentionnel Brentano retient six critères : a) un phénomène psychique est inétendu, b) il repose sur des représentations, c) il est porté par une présence intentionnelle comme rapport-à-quelque-chose, d) il est le seul à être objet d’une perception interne dans une évidence immédiate, e) il possède une existence effective pour le sujet, f) il est perçu de manière unitaire.
La marque qui caractérise les actes intentionnels, c’est la présence intentionnelle entendue comme inexistence, au sens où la relation avec un objet n’est pas à confondre avec une chose, une réalité. Par exemple, la conscience d’image est bien une forme de conscience, même si son objet n’est pas réel.
L’intentionnalité est ce pouvoir qu’a la conscience de viser un objet, on dira aussi « avoir un objet immanent », « contenir quelque chose à titre d’objet ». Le fait psychique est dit intentionnel parce qu’il contient quelque chose à titre d’objet, même si c’est de manière différente, par exemple comme perception, croyance, jugement, désir, haine etc.
------------------------------Brentano
propose une classification des phénomènes psychiques en plusieurs catégories :
a) En représentation,
Vorstellung. La représentation implique l’intervention de l’esprit dans
l’élaboration de constructions mentales. La re-présentation
est présentation seconde, par l’esprit dans la pensée.
b) En jugement, Urteil. L’activité judicatoire
présente très clairement une visée de quelque chose, cette fois interprétée sur
le plan logique : jugement de fait, comme jugement de
valeur. c) en mouvement affectif
Gemütsbewegung. Le mouvement affectif désigne ce que nous appelons d’un nom
générique, la sphère de l’émotionnel. d) Intérêt,
Interesse. Le mot intérêt est
remarquable à plus d’un titre, car il désigne le fait d’être tourné vers, ouvert
à quelque chose qui retient l’attention. Si un
élément est susceptible de canaliser l’intention, c’est bien « l’intérêt pour ».
e) Amour, Liebe. Le mot amour est pris ici au sens de l’amour
de quelque chose, comme mouvement vers ce qui est aimé.
2) Qu’est-ce
que la phénoménologie va ajouter à cette description de l’intentionnalité ?
Husserl conserve la classification de Brentano, même si son champ
d’investigation le porte surtout vers ce qui concerne la
théorie de la connaissance.
Deux idées maîtresse monopolisent son travail : (texte)
a) d’abord l’idée de la présence intentionnelle, « Tout état de
conscience en général est, en lui même, conscience de
quelque chose, quoi qu'il
en soit de l'existence réelle de cet objet ». b) Ensuite, le fait que
l’intentionnalité prenne une diversité de formes : « La perception de la
"maison""vise"(se rapporte à) une maison - ou, plus exactement, telle maison
individuelle - de manière perceptive ; le souvenir de la maison "vise" la maison
comme souvenir: l'imagination, comme image; un jugement prédicatif ayant pour
objet la maison "placée devant moi" la vise de la façon propre au jugement
prédicatif: un jugement de valeur surajouté la viserait encore à sa manière, et
ainsi de suite ». Nous ne trahirons pas du tout Husserl en disant que la
totalité de son programme de recherche est orientée par ces deux fils
conducteurs dont il ne se cesse de dégager les implications.
Nous devons souligner – brièvement - la fécondité de la phénoménologie et son influence sur la pensée occidentale. Ce qui est intéressant avec un penseur comme Husserl, c’est que nous avons affaire à une philosophie « en marche », qui explore, un peu comme on taille à la machette dans une jungle où personne ne s’est aventuré. D’où la possibilité de se perdre, d’où le manque d’organisation, l’absence de système, le manque d’unité parfois. Mais il y a une méthode et une ouverture. Les disciples directs ou indirects qui suivent vont privilégier une des voies ouvertes par le maître. Levinas retient dans a) la donation de sens et creuse dans b) le problème de l’intersubjectivité. Max Scheler s’attache dans b) à l’expérience des valeurs éthiques. Sartre radicalise a) et s’attache dans b) à l’imagination. Heidegger accepte a) et pousse l’interrogation du rapport de l’existence à l’être. Merleau-Ponty retient a) et prolonge dans b) le travail sur la perception, il insiste sur la place du corps. Michel Henry va entièrement renouveler a) la question du sujet pur, de l’ipséité, en remettant en cause la place de l’intentionnalité.
3) C’est donc à Michel Henry que nous allons laisser le dernier mot. Cependant, auparavant, retour en arrière. Nous avons vu que si la conscience nous semble dans la vigilance toujours intentionnelle, tous les vécus ne le sont pas. En effet, la sensation déjà témoigne de ce type de vécus qui n’est pas intentionnels, à la différence de la perception. Nous savons que Husserl, en dépit de la contradiction avec son idée première, a été attentif à la matière non-intentionnelle de la sensation. (texte) Il a proposé de voir dans l’intentionnalité perceptive une forme et dans la pâte sensible non-intentionnelle, une matière. De même, il aurait pu rejeter l’idée d’intention inconsciente, et pourtant il admet qu’il y a dans l’ego une frange d’inconscience, et l’idée de motivation inconsciente conserve un sens dans l’approche de la phénoménologie. Si dans le principe, toute conscience est bien conscience-de-quelque-chose, Husserl n’en tire pas pour autant, comme Sartre, l’idée que l’intimité n’est que de l’extériorité et du vent. Le pur Témoin, le Spectateur transcendantal, (texte) n’est certainement pas un courant d’air, mais un sens intime.
Mais il est vrai qu’alors la question : « qu’est-ce que le Soi ? » se pose dès lors de manière particulièrement aiguë. Husserl ne peut pas y répondre clairement, parce qu’il reste prisonnier du principe de l’intentionnalité qui définit le sujet uniquement dans sa relation à un objet. Parce qu’il demeure à l’intérieur d’une philosophie de la représentation. La formule « toute conscience est conscience de quelque chose » désigne l’apparition simultanée du sujet et de l’objet dès l’entrée dans l’état de veille. Elle vaut encore, quoi que sur un mode que nous savons illusoire, dans l’état de rêve. Et c’est la disparition simultanée du sujet et de l’objet qui se produit dans le sommeil profond. Le sujet qui apparaît, puis disparaît, qui n’existe qu’en relation à un objet - et qui pourtant, voudrait proclamer son existence séparée à la face de l’univers ! - est le moi empirique, l’ego. Il n’est pas le véritable sujet. (texte) Si le mouvement de l’intentionnalité s’applique fort bien à l’ego et sa quête éperdue d’un objet, là-bas dans l’extériorité, comme dit Sartre, dans un « but », d’un « projet », un « objectif », un « résultat » dans le futur, dans le temps psychologique ; le Soi ignore la division sujet objet. La scission sujet/objet est une coupure métaphysique produite par la pensée et qui n’existe que dans la pensée et non dans l’Être. Le Soi de l’Être, n’apparaît pas et ne disparaît pas. Il cohère avec Soi en-deçà du temps, il demeure Soi parce qu’il est dans son essence de ne pouvoir se quitter, sa passive épreuve étant précisément ce que nous appelons la Vie. Il revient à la phénoménologie de la Vie de Michel Henry d’avoir redécouvert ce que Husserl laissait dans l’obscurité. Il existe une dimension de la Conscience qui précède la conscience fondée sur l’intentionnalité qui est à l’œuvre dans la vigilance. La critique répétée et insistante de Michel Henry contre le principe de l’intentionnalité (texte) n’a qu’un sens : remonter à cette Vie, qui, sise en elle-même, précède toute relation à l’objet. Cette région du non-manifesté qui est ontologiquement antérieure (texte) à toute conscience d’objet. Là où le Soi et l’Être ne peuvent en aucune manière être séparés. Nous avons vu à cet égard que lorsque Louis Lavelle approche ce qu’il nomme La Présence totale, Or ce que Lavelle entrevoit, c’est que le sens intime précède l’intentionnalité. L’Être se donne immédiatement à Soi, se tient près de soi, dans cette Conscience qui précède toute projection intentionnelle vers un objet. La Présence est cela même, une donation de soi à soi de la Vie, dans l’unité, sans division, ici et maintenant.
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Nous voyons donc que le thème de l’intentionnalité est resté dans la pensée occidentale une préoccupation de la théorie de la connaissance. Depuis Kant les penseurs occidentaux sont férus non pas de Connaissance, mais de théorie de la connaissance ! Dans pensée, le concept d’intentionnalité ne retient que la structure sujet-objet et il laisse de côté l’énergie, la direction, l’intelligence de l’intention.
Le mot intention peut être pris dans des sens différents. Par exemple, d’un point de vue moral, nous qualifions d’ordinaire la bonne volonté en disant que celui qui la manifeste est plein de bonnes intentions, tandis que la mauvaise volonté serait le fait d’être rempli de mauvaises intentions. Chacun de nous reconnaîtra aisément que l’intention précède l’action, elle est comme une flèche sur l’arc qui attend d’être décochée. L’intention se traduit par des actes de la même qualité qu’elle, mais elle est plus difficile à discerner que l’acte lui-même, car elle est toute intérieure, tandis que l’acte lui se produit sur la scène de l’espace et du temps.
1) Ne voir dans l’intention que sa valeur morale est très limité. Dans le langage courant, cela tient à une confusion banale entretenue entre conscience psychologique et conscience morale. Or l’intention est d’abord un acte psychique. A sa racine l’intention est une impulsion d’intelligence dirigée vers un but. Si je dis que j’ai l’intention de me rendre en Australie, je ne fais que formuler une orientation, une visée qui est un foyer potentiel vers lequel je me dirige. Ce n’est pas ce que je fais en ce moment, ici et maintenant, qui peut ne pas avoir de rapport avec cette intention. Le maintenant est tout ce qui est, ce qui réclame une grande attention.
Toutefois,
même si l’attention est d’ordinaire dirigée
vers le champ de conscience, je peux aussi porter mon attention sur mes
propres intentions. Nous avons vu précédemment que la
vigilance est une attention
essentiellement tournée vers le monde extérieur. Donc vers l’objet. C’est
le sens courant de l’expression « fais attention ! » Nous avons vu que
l’ek-stase de la vigilance est telle que nous avons
tendance
à nous perdre dans le domaine de l’objet, dans le
domaine des formes, donc à nous oublier nous-mêmes. Il est possible d’être
conscient dans le domaine des objets, parce que nous faisons attention, tout en
étant dans l’inconscience vis-à-vis de nous-mêmes.
C’est pourquoi nous avons distingué précédemment la vigilance de la lucidité. Ce
qui a été dit à ce sujet, c’est que la
lucidité procure une détente, donne une plus grande ouverture à la
conscience, une ampleur qui fait communiquer l’intérieur et l’extérieur. La
lucidité consiste à être conscient à la fois
du monde extérieur et de soi-même, simultanément. Elle est observation
non-duelle. Et que découvre
la lucidité ? Nous avons vu qu’elle nous permet d’être conscient des
réactions qui surgissent en
nous, du jeu de l’émotionnel. Ce qui veut
aussi dire être conscient de nos intentions, (texte) de nos motivations.
Surprendre l’ego entre autre ! Ce qui n’est bien sûr
pas le cas dans la conscience
ordinaire, car l’identification au domaine de
l’objet est suffisamment hypnotique pour voiler en permanence l’activité de
l’ego agissant et ses intentions.
Il peut sembler, avec ce que nous venons de dire, que c’est seulement en étant lucide que nos intentions sont claires et que l’attention est véritablement portée sur les intentions. C’est vrai. Toutefois, même en l’absence de la lucidité, l’attention est là, et elle déverse sur l’intention une énergie et la nourrit. Elle n’est pas à confondre avec elle. L’attention nourrit d’énergie le flux de la conscience et l’intention, elle, transforme, organise sa propre réalisation. C’est une loi fondamentale de la conscience : tout ce sur quoi nous portons notre attention grandit, et inversement, ce sur quoi nous ne portons pas notre attention aurait plutôt tendance à flétrir. C’est encore vrai, même si la conscience est lourde et obscurcie. Pour reprendre notre analogie initiale, l’attention c’est un peu comme le travail du jardinier qui arrose la plante et apporte un fertilisant, l’attention nourrit l’intention qui est la graine et favorise son développement.
2) Ce qui signifie que nous pouvons ne pas être très clairs sur nos propres intentions et même ne pas vouloir les reconnaître. Dans les termes de Freud, une intention est consciente, si elle correspond à la visée d’une pensée soumise à la juridiction de l’ego. Reconnaître ses intentions revient alors pour le moi à reconnaître ses désirs. Juste pour rire : l’intention de demander la jeune beauté en mariage, exprime le désir amoureux dans le vœu d’un avenir commun !... Cependant, nous avons vu que pour Freud une intention peut aussi être inconsciente. Rappelons-nous l’exemple de l’intention exprimée en rêve en étranglant un petit chien blanc de tuer la belle sœur. - Intention que le sujet peut très bien nier -. L’intention n’en reste pas moins là, à un certain niveau, provoquant, comme le dit Freud, un malaise dont le sujet n’arrive pas à se départir, car il est comme possédé par une pensée indésirable, une pensée qui n’est pas soumise au moi. Ce qui définit l’état général de névrose. Le schéma proposé par Freud est simple : lorsqu’une pulsion émerge du vital et se présente au seuil de la conscience, elle se heurte à une censure morale, (texte) si elle est jugée indésirable, elle est renvoyée dans l’inconscient et refoulée. Elle va alimenter le réseau tortueux des conflits inconscients. Elle ne cesse pas d’exister, car ce qui est refoulé n’est pas pour autant supprimé tant que le nœud psychique qui retient la tendance n’est pas résolu. L’intention demeure donc à un état latent, inconscient. Le psychisme du sujet se trouve alors maintenu dans un état de division (cf. Prajnanpad texte) entre conscient et inconscient. L’intention inconsciente s’exprime dans les défaillances de l’attention, par exemple sous la forme d’actes manqués, de conduites obsessionnelles etc. Il y a un exemple très intéressant chez Arnaud Desjardins. Il raconte qu’à un moment, dans l’ashram de S. Prajnanpad, il chassait comme un fou les moustiques à l’aide d’une bombe insecticide. Jusqu’au moment où il est tombé nez à nez… sur le Swami. Il a alors compris en un éclair… qui il voulait tuer ! C’est ce qui s’appelle une mise en lumière de l’intention inconsciente.
Nous avons vu qu’une trace traumatique du passé est très persistante. Elle peut demeurer endormie sur une période prolongée et ne trouver d’expression émotionnelle que dans les circonstances favorables qui réveillent son dynamisme. Freud pense que l’on est en droit de parler d’une expression de « désirs » inconscients dans les actes manqués et les rêves. Cependant, le terme désir mobilise tellement le conscient qu’il y a ambiguïté. Nous préférons ici parler de tendances ou de forces inconscientes. Ce qui est certain, c’est que l’inconscient peut porter en lui le germe d’une intention.
3) La polémique entre Sartre (texte) et Freud est intéressante à ce titre. Sartre soutient que l’inconscient freudien est le refuge de la mauvaise foi. Admettant une transparence de la conscience, Sartre pense que le sujet en sait bien plus sur ses intentions qu’il ne veut bien le reconnaître. S’il se les dissimule, c’est par déni, pour ne pas les voir, donc par une mauvaise foi (texte) implicite. Si une intention est là en nous et si elle est chassée, occultée et refusée, c’est bien que le sujet « quelque part » le sait ! L’ego joue à cache-cache, cela fait partie de son jeu. Mais tant que nous ne sommes pas clair sur nos intentions, nous vivons dans un monde d’illusions auto-entretenues. Et ces illusions ne sont rien d’autre que notre conscience habituelle avec son petit nuage de pensées. De plus, nous avons vu que la division entre conscient et inconscient est artificielle, il n’existe en réalité pas de coupure dans le psychisme. Quand l’esprit, par la censure, entretient en lui-même une division, il ne fait que lutter contre ce qu’il est. C’est une lutte perdue d’avance et qui n’empêche pas les germes d’intentions inconscientes de se manifester sur le mode réactif qui leur est propre. Au moment où une réaction inconsciente se manifeste il est possible de ne pas exercer de censure et de remonter le cours de la pensée, afin de mettre en lumière nos intentions. C’est exactement de cette manière que Krishnamurti décrit l’action de la lucidité et donc le pouvoir de l’attention. En l’absence de tout jugement, ou de toute identification, il est possible d’avoir une vision en profondeur (texte) à la racine où se trouve l’intention.
Dès qu’il y a dans la conscience une intention, que celle-ci soit vague et indéterminée, ou qu’elle soit clairement délibérée, elle opère, et ne manque par de suivre son cours. Elle se transforme en désir et le désir cherche son remplissement effectif ou sa réalisation concrète. Le désir apparaît avec la pensée au niveau conscient. Comme une bulle qui remonte des profondeurs d’un lac et finit par éclater en surface. Sur le plan du conscient, chez la plupart des êtres humains, la fascination du désir est telle, qu’elle absorbe complètement leur attention. Elle consume l’attention en la tournant complètement vers l’extérieur (texte) et vers l’objet du désir. Au dépend du reste d’ailleurs. Nous avons vu ce processus au sujet de la passion tournée vers l’objet, la passion-de-quelque-chose. D’où le phénomène étrange qui l’accompagne de la cristallisation, qui comporte une dose d’aveuglement sur soi assez extraordinaire. Une fois que l’intention est dirigée, elle est nourrie avec l’énergie du désir. Une bonne part de l’énergie de nos désirs est issue de l’effort (texte) et de la frustration, et reste tournée vers la recherche d’une complétude de l’ego. Une part moindre vient de l’élan d’accroissement spontané de la Vie, de l’enthousiasme créateur qui n’a de cesse de nourrir de son amour une création vivante et libre.
La Manifestation est tout entière énergie. Il n’est aucune chose, ni aucune entité qui ne soit réductible à de l’énergie. Des galaxies les plus lointaines, aux plus fines particules, de la pulsation quantique du champ unifié, jusqu’aux variétés infinies de formes des cristaux, des créatures vivantes, depuis la pensée qui germe dans l’esprit d’un enfant, à l’œuvre mûrie d’un artiste, il n’y a partout que des formes d’énergie. Lourde quand on localise une chose à notre échelle, plus éthérée quand il s’agit des pulsations de l’intelligence. Une forme qui apparaît et qui se maintient pendant un temps, ne peut le faire que conformément à une loi, à un ordre qui lui est propre. Aussi bien pourrions-nous appeler le champ de forme qui structure un objet, une intention réalisée.
1) Nous avons vu précédemment avec
Rupert Sheldrake la fécondité de la
causalité formative.
Elle montre de manière éclatante que la mémoire, comme
champ d’information, est
inhérente à la Nature. Ainsi s’explique la perpétuation des formes dans
l’inertie de la répétition de habitude,
mais s’explique aussi de la même manière la perpétuation des
initiatives de comportement du
vivant au sein de son espèce. Contrairement à ce qu’a pu maintenir le paradigme
mécaniste issu de la modernité, plus rien ne s’oppose désormais à ce que nous
puissions parler d’intention formelle à l’œuvre dans la Nature. Il faut
et il suffit de considérer que le champ de l’intention, s’il enveloppe
une intelligence de la forme, n’est pas conscient au sens où un être humain est
conscient.
Inversement, il est naturel qu’une intention consciente se traduise par une initiative de comportement et qu’elle préside à son organisation. Qu'elle soit pratique, artistique ou de n'importe quelle autre sorte, c'est l'intention qui décide d’une création nouvelle.
Selon la physique, plus on descend au cœur de la matière, vers le non-manifesté, plus l’énergie s’accroît. De même, au niveau de la pensée, le domaine de l’intention contient une réserve de puissance infiniment plus grande que celle qui se rencontre dans sa manifestation en tant que désir. L’intention est l’essence du non-manifesté se préparant à entrer dans la manifestation. L'intention agit sur la transformation de l'énergie et de l'information et elle organise sa propre réalisation.
Cependant, la puissance de l’intention n’est pas séparable de l’état de conscience dans lequel elle est émise. Nous comprenons aisément que dans l’état de rêve l’intention puisse fleurir sans difficulté et c’est ce qui fait du rêve, comme l’a vu Freud, la réalisation de désirs sur le plan imaginaire. L’intention opère dans le rêve comme par magie, à l’image d’une création absolue, appelée traditionnellement ex nihilo. Il en est autrement dans l’état de veille dans lequel la concrétisation de l’intention mobilise le corps de chair, demande une application soutenue, un travail, implique du temps, et se déploie dans un monde commun qui offre bien plus de résistances que le monde onirique. L’opération de l’intention dans le monde de la veille est une création relative, comme celle de l’artisan qui travaille une matière jusqu’à lui donner sa forme définitive. Aussi reconnaissons-nous sans difficulté que la pensée qui s’évade des contraintes de l’état de veille puisse préformer directement dans le rêve sa matière et déborde d’imagination ; tandis qu’elle ne peut dans l’état de veille qu’initier le processus créateur et ensuite influencer indirectement la matière en conduisant sa mise en forme. Dans la conscience ordinaire, le frénétique du désir qui n’a pas la patience du temps, le déçu et l’impatient, celui qui renonce et s’estime raté, - quand d’autres réussissent tout ce qu’ils entreprennent ! - n’aura donc, faute de savoir éduquer ses désirs, plus qu’une voie de garage, celle de la compensation imaginaire : c’est une des leçons du pessimisme freudien. La lutte perdue d’avance entre principe du plaisir et principe de réalité.
2) À moins que… à moins que… cet état de conscience ordinaire ne soit lui-même changé et que nous apprenions à vivre le désir d’une manière complètement différente, au plus près de l’intention, et pas du tout fixé sur une attente ou identifié à un résultat.
Que veut dire l’expression « état de conscience ordinaire » appliquée au processus du désir ? Premier point : la conscience habituelle est une conscience inscrite dans la dualité et où le sens de la séparation est si violent qu’il induit de lui-même la lutte, le conflit avec le réel. Second point, la conscience habituelle est la conscience centrée sur l’ego et dans cet état, le processus du désir ne génère que ce que nous avons appelé les désirs de l’ego.
L’illusion
première réside dans la croyance dans l’existence d’une séparation. Si l’illusion
consiste
fondamentalement à surimposer au
réel une construction mentale irréelle, alors la croyance dans la séparation est
une illusion formidable et dans
cette mesure même dévastatrice. Nous avons vu en quel sens, même du point de vue
de la physique, l’univers tout entier est
impliqué dans l’apparition de n’importe quel
événement de sorte que toute existence ne peut
qu’être considérée que comme un dessin dynamique dans la toile de l’Univers.
L’implication en est, qu’à partir du moment où un événement apparaît dans l’espace-temps-causalité,
il possède, comme dit Eckhart Tolle, une
inévitabilité, (an inevitability of what is), il est ce qu’il
est, et rien ni personne ne peut le nier. Sauf à vouloir se leurrer. Parce qu’il
n’existe pas d’événement séparé ni même séparable de la totalité de la
Manifestation. Nous ne pouvons que dire
OUI à ce qui est, qu’accepter ce
qui est et l’acceptation
intégrale remet sur pieds le désir
et modifie en profondeur le sens de l’intention, ainsi que l’idée même de la
satisfaction. Voici par exemple ce que Nietzsche
écrit :
« La première question n'est nullement de savoir si nous sommes satisfaits de nous-mêmes, mais s'il y a quelque chose de quoi nous soyons satisfaits. En admettant que nous disions "oui" à un seul moment, nous avons par là dit "oui" non seulement à nous-mêmes, mais à l'existence tout entière. Car rien n'est isolé, ni en nous-mêmes, ni dans les choses: et, si notre âme a frémi de bonheur et résonné comme les cordes d'une lyre, ne fût-ce qu'une seule fois, toutes les éternités étaient nécessaires pour provoquer ce seul événement, et, dans ce seul moment de notre affirmation, toute éternité était approuvée, délivrée, justifiée et affirmée. " (texte)
Magnifique et vertigineux. Dans tout ce que nous avons voulu, dans tout ce que nous avons désiré, dans tout ce que nous avons pu obtenir, l’univers était toujours impliqué et la puissance de l’Univers était à l’œuvre. Parfois, nous avions le sentiment de chevaucher les vagues de l’Intention, de sorte que nous obtenions le support de la Nature dans nos réalisations. Parfois il nous a semblé que l’Univers conspirait contre nous et nous avons levé le poing contre l’ironie d’un Destin acariâtre qui faisait tout pour nous contrarier. Mais nous ne pouvons strictement rien faire et nous n’avons jamais rien fait sans que soit impliqué l’appui de la Totalité.
La
petite personne se complaît dans
une fiction et alimente dans ses désirs une
fiction. Elle n’est jamais satisfaite et elle ne peut
l’être. L’ego n’est jamais satisfait, car ses désirs
ne sont que fantasmes et ils ne sont que personnels.
Comment l’Univers pourrait-il servir un fantasme autrement que de manière
purement accidentelle? Et surtout, comment l’univers pourrait-il soutenir celui
qui ne se connaît pas lui-même, qui ne connaît pas ses
vrais désirs et ne sait pas ce qu’il
veut ? Comment pourrait s’accomplir un désir qui ne fait pas corps avec ce qui
est ? Seule une intention qui transcende les
désirs de la petite personne et
répond à ce qui est peut recevoir un appui, le support de la Nature. Pas une
intention de la petite personne. Nous avons vu en effet que le
conflit avec la réalité n’est pas quelque chose qui est
« accidentel » par rapport à l’ego. Il est par avance inscrit dans la nature
de l’ego. L’existence même de l’ego est
problématique et est conflictuelle.
Et c’est ainsi que la petite personne devient de ce fait séparée
distinguant ses intérêts propres de l’intérêt
du tout. Que gagnons-nous à n’avoir d’intention que de servir nos intérêts
personnels ? N’est-il pas évident que la recherche de la satisfaction des
intérêts personnels se fait toujours au dépends de l’intérêt
de la totalité ?
Dans ce registre, voici ce que Descartes écrit à Elisabeth :
« Il y a une vérité dont la connaissance me semble fort utile : qui est que, bien que chacun de nous soit une personne séparée des autres, et dont, par conséquent, les intérêts sont en quelque façon distincts de ceux du reste du monde, on doit toutefois penser qu'on ne saurait subsister seul, et qu'on est, en effet, l'une des parties de l'univers, et plus particulièrement encore l'une des parties de cette terre, l'une des parties de cet État, de cette société, de cette famille, à laquelle on est joint par sa demeure, par son serment, par sa naissance. Et il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie, à ceux de sa personne en particulier.. » (texte)
Magnifique. C’est une clé. Bien plus qu’une recommandation morale, c’est une vérité métaphysique. Nos désirs les plus vrais, nos préférences les plus intimes n’ont jamais eu d’autre objet que l’amour de ce qui est. Pas le culte de la petite personne. Jamais nous ne nous sommes sentis libre que dans le dévouement en réponse à ce qui est. Jamais nous n’avons disposé d’autant d’énergie que lorsque nos intentions se joignaient à l’unité de l’Intention. Ce qui ne veut pas dire qu’alors il ne peut plus y avoir d’adversité. Non. Mais de cette manière, après avoir fait ce que nous pouvions faire, l’attente et le souci des résultats cessait de nous obséder. Une fois l’intention émise et l’action effectuée, le mouvement suit son cours et il ne nous appartient plus. Comme une ride qui se répand à la surface d’un lac, l’intention rejoint l’univers qui lui fait écho et lui donne sa résonance. Cela ne dépend plus de toi dirait Épictète ! Ce qui dépendait de toi, l’embrasement de ton amour et la profondeur de ton intention… la suite appartient à l’Histoire et au jeu éternel du Devenir.
------------------------------3) Nous ne
devrions jamais sous-estimer la puissance de l’intention – et surtout pas au nom
des petits revers et des contrariétés que rencontrent nos désirs personnels !
L’intention, nourrie par l’attention consciente et dépouillée des caprices de la
petite personne, possède un pouvoir d’organisation capable d’orchestrer une
infinité d’événements spatio-temporels. L’intention agit comme une cause
formelle et elle possède une puissance formatrice.
Nous avons examiné précédemment l’interaction entre la conscience et le corps. Nous avons vu la continuité entre l’intention exprimée dans la pensée et son auto-transformation et traduction métabolique dans le corps. Impossible de croire dans ces conditions dans un dualisme entre une « chose pensante », qui serait l’esprit, complètement distincte et séparée d’une « chose étendue » qui serait la matière. Le corps n’est pas semblable à une chose, mais à une rivière d’énergie maintenant une forme ; de même, la conscience est encore moins une chose, mais aussi une énergie. Ainsi l’intention, qu’elle soit consciente ou inconsciente, œuvre-t-elle dans le corps dans une constante interrelation. Si nous acceptions un instant de laisser tomber les présupposés liés au paradigme mécaniste, nous serions certainement plus ouverts à l’idée d’une interaction énergétique entre les niveaux les plus fins de la pensée et le corps comme entité physique.
4) Nous avons vu que le concept de « corps » est défini par Descartes comme un objet dans l’espace. Nous avons aussi vu l’idée de Newton selon la quelle ces objets se meuvent au sein d’un espace temps en trois dimensions, conformément à certaines lois du mouvement considérée comme immuables. De cette manière les « choses » qui nous entourent sont considérées comme ayant des frontières fixes et sont douées d’une existence indépendante par rapport à nous. Pour qu’un influence quelconque soit exercée, il fallait, selon les mécanistes cartésiens qu’une action physique intervienne selon les lois du choc. Jusqu’à ce que l’explication se complique, quand Newton découvrit qu’il existait aussi une force s’exerçant à distance et sans contact, la gravité. Mais la vision chosique de la matière s’est pourtant maintenue. Dans la physique classique, les lois newtoniennes devinrent les grandes règles du jeu de la science et ce sont ces règles que l’on enseigne toujours dans les classes de terminale scientifique. Le comportement classique de la matière. Elles reposent sur une prémisse : les « choses » matérielles existent de manière séparée et leur comportement est entièrement prévisible. Il est intéressant de remarquer que ce concept de la « chose » n’est rien d’autre sur le fond que la reformulation dans la représentation scientifique d’une expérience de la dualité sujet/objet de la vigilance quotidienne. Notre « bon sens » ne risque pas d’être bousculé par cette physique, elle colle exactement avec notre dualisme spontané.
Cet ordre
gentiment rangé et obéissant n’a pas tenu très longtemps quand on a découvert
avec la physique quantique, qu’au
cœur de la matière, ce que l’on croyait être des petites entités, ne se
comportait pas du tout comme le prévoyaient les règles connues jusqu’alors. On
avait affaire non à des
petits cailloux, mais à nuages d’énergies enveloppant un potentiel de
manifestation, ici ou là, selon une somme de probabilités d’apparition
d’événements. A la fois particule et
fonction d’onde. Un peu comme une
personne qui observerait ses multiples reflets dans un miroir et qui serait à la
fois dans la rue et serait aussi la rue elle-même ! Bref, le
comportement quantique de la matière
n’avait pas de forme précise. Un casse-tête redoutable pour l’intellect.
La matière au niveau le plus subtil était comme une gelée qui n’a pas encore
prise, tandis qu’au niveau macroscopique, qui est le nôtre, la gelée devenait
très « solide » et constituait les choses bien résistantes qui nous entourent.
Très obéissantes au demeurant vis-à-vis des lois de Newton. Les physiciens
durent se résigner à avoir deux physiques, très efficaces, mais dont les
prémisses étaient contradictoires ! Tout allait à peu près bien si on les
utilisait séparément. Cependant, théoriquement, le
dilemme était frustrant, ce qui devait
pousser les physiciens, depuis Einstein, jusqu’à la
théorie des cordes, dans une quête éperdue de l’unification.
Et le comble, c’est qu’en plus, on s’est peu à peu rendu compte qu’il pouvait
aussi exister, dans certaines conditions… un comportement quantique de la
matière à une échelle macroscopique ! Bref, c’est une simplification commode
qui nous faire croire que l’univers est une sorte d’entrepôt d’objets séparés et
statiques. C’est loin d’être la vérité. Il est beaucoup plus pertinent de le
comprendre comme une mer d’énergie, dont les états sont interconnectés et en
perpétuel Devenir. Il serait même encore plus juste d’y voir un organisme
et
un immense réseau d’informations, dans lequel tout ce que nous appelons
« partie » se trouve en communication constante avec le tout. Bon gré, mal gré,
la théorie quantique a dû nous faire
accepter l’idée que l’observation n’est pas
séparable de ce qui est observé. Le comble étant, que tout se passe comme si l‘observation
elle-même influençait l’observé
dans la détermination de son état final ! (texte)
Lynne Mac Taggart
La Science de l'Intention.
Quand on est parvenu à ce point, l’idée selon laquelle l’intention, comme impulsion d’intelligence douée d’énergie, puisse interagir avec le champ d’énergie de la matière ne fait plus problème. Il n’y a ni séparation, ni dualité et tout ce que nous rencontrons n’est de toute manière qu’énergie. Ainsi les effets placebo ou nocebo – examiné précédemment - qui heurtaient une rationalité fondée sur le comportement classique de la matière, ne sont plus surprenants, mais naturels. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. En fait, personne ne sait exactement de quoi l’intention agissant sur le corps est capable et jusqu’où elle peut aller. Le yoga montre que celui possède une grande maîtrise de l’intention et une grande pratique peut agir sur la structure énergétique du corps, s’alimenter de prâna, et modifier les fonctions vitales. Il y a des études très documentées sur le sujet.
C’est par ignorance que nous ricanons au sujet de la « méthode Coué » et de l’idée qu’une intention, ne serait-ce que par suggestion, puisse produire un effet. Mais c’est de la sottise. Un examen impartial nous montrerait que toute notre vie a été un croisement, un cheminement d’intentions. Il n’y a jamais eu que cela autour de nous, en nous et partout. L’Univers est une Intention magistrale, si prodigieuse qu’elle est incompréhensible à tout intellect humain. Une grande Pensée disait le physicien John Wheeler, pas une grande machine.
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Un philosophe lecteur des livres de Carlos Castaneda se demandent toujours comment il est possible de faire le tri entre le récit littéraire, presque policier, relevant du prodige et de l’incroyable et ces Enseignements foudroyants de chamane qui parsèment les pages. Peine perdue certainement. Mais c’est tout de même très piquant et plaisant à lire. Le psychiatre Wayne W. Dyer dans Le Pouvoir de l’Intention commence son premier chapitre et bâtit tout son livre en commentaire de cette phrase de Castaneda : « Il existe dans l’univers une force incommensurable et indescriptible. Cette force, les chamanes l’appellent l’Intention, et absolument tout ce qui existe dans l’univers est relié à l’Intention… Lorsque les sorciers… font appel à l’Intention, elle vient à eux et trace le chemin qu’ils doivent suivre». Très énigmatique admettons. Aux frontières de l’expérience possible. Mais pas dépourvu de sens.
Dommage que la phénoménologie n’ait fait qu’un petit bout de chemin dans cette direction, car l’intentionnalité suivie jusqu’au bout est vraiment un fil conducteur tout à fait génial. Une clé pour comprendre la conscience et saisir la puissance de la Manifestation, d’une complexité inouïe.
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Questions :
1. Parler d'intention consciente implique-t-il nécessairement que l'on parle aussitôt de bonnes et de mauvaise intentions?
2. Peut-on réellement se cacher ses propres intentions?
3. Concevoir l'intention comme immanente au cosmos, n'est-ce pas valider directement la théorie de la synchronicité des événements?
4. Mis à part ses effets produits dans la nature qu'il est possible d'étudier, l'intention n'est-elle pas rebelle à toute explication scientifique?
5. Peut-on être sûr de déceler les intentions d'autrui?
6. Peut-on vraiment prouver qu'un acte a été accompli avec l'intention de son auteur et non de manière automatique ou mécanique?
7. Le sens commun tend à prendre le mot intention uniquement comme un motif d'ordre moral soumis au jugement (ce n'était pas mon intention!) A-t-il raison? Qu'est-ce qu'il néglige?
© Philosophie et spiritualité, 2010 Serge Carfantan,
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